Une Banque de Ressources
Consacrées au Réveil
|
|
L'Eglise de l'Unité
des Frères
d'E.A. Senft
DEUXIEME PARTIE
De la mort de Zinzendorf jusqu'à nos jours.
1760 - 1888
CHAPITRE 16
LA DISPARITION DES DERNIERS REPRESENTANTS DE
L'EPOQUE DE ZINZENDORF
Pendant que l'Eglise de l'Unité accomplissait
l'œuvre de son organisation définitive et qu'elle s'efforçait
de faire valoir, dans ses Missions et dans la patrie, l'héritage
que lui avait laissé son époque classique, ils s'en allaient,
les uns après les autres, ceux qui, contemporains de Zinzendorf,
avaient vu de leurs yeux le grand passé. La plupart d'entre eux,
après une vie généreusement dépensée
au près et au loin, an service de Christ et de leur Eglise, vinrent
mourir à Herrnhut et reposer sous les tilleuls du Hutberg. Celui
qui termina la longue série de ces hommes et de ces femmes distingués,
fut Jérémie Risler, décédé à
Herrnhut, en 1810, âgé de quatre-vingt-onze ans.
Parmi cette nuée de témoins
recueillis dans les demeures éternelles, nous relèverons
les quelques noms suivants:
Le 1er avril de l'année
1766, s'endormit en paix l'évêque Léonard Dober, membre
du directoire de l'Eglise, après avoir été, dans
le temps, son premier missionnaire et son ancien en chef. On sait le rôle
prépondérant que cet homme avait joué jusqu'en 1741.
Dépouillé alors des fonctions qui l'avaient élevé
au-dessus de tous ses frères, il continua, à servir ceux-ci,
avec une grande humilité, dans une série de postes divers
durant plus de vingt ans encore. Lui disait-on, vers la fin de sa vie,
qu'on ne pouvait se passer de lui, il répondait: "L'Eglise
a été déposée sur le cœur de Celui qui la
porte." Les noms de toutes les communautés étaient
sur ses lèvres mourantes. Vrai sacrificateur du sanctuaire, il
ne cessa d'intercéder pour ses frères que lorsque le Maître
l'appela à lui.
Six ans plus tard, David Nitschmann, le tisserand,
premier évêque de l'Eglise de l'Unité renouvelée,
suivit dans la mort celui avec lequel, un jour, il avait ouvert, à
St-Thomas, la campagne missionnaire morave.
Après une vie invariablement simple,
austère, entièrement consacrée au service de Christ,
il quitta ce monde à Bethléem, en Pennsylvanie, âgé
de soixante-seize ans.
L'été de l'année 1777
vit partir Frédéric de Watteville, le plus ancien ami de
Zinzendorf. " Personne ne fût jamais " Frère
" mieux que lui, " dit Schrautenbach. Homme plein de grâce
et de cœur pour tous, et mettant du cœur partout, humble, n'aspirant jamais
aux places élevées, d'une rare fidélité, possédant
la confiance même de ceux qui se méfiaient de chacun, il
était généralement aimé et vénéré
par ses frères. Aussi l'Eglise fit-elle mettre cette épitaphe
sur sa tombe :
Il aida, dès le commencement,
à bâtir l'Eglise; il la vit verdir et fleurir; il s'en
réjouit, puis il entra dans son repos avec louange et actions
de grâce.
Frédéric de Watteville précéda
de six ans son frère aîné, Nicolas, que Dieu reprit
à lui à Herrnhut. Le 29 mars de l'année 1781, le
vieillard de quatre-vingts ans, encore employé au service des Missions,
eut une légère attaque. Souriant, il dit alors à
quelques amis qui étaient venus le voir: " Le Sauveur a
heurté à ma porte; il m'appellera bientôt."
Peu de semaines plus tard, le Maître vint, et l'introduisit dans
sa gloire.
Encore un an, et l'Eglise perdit, en 1784,
à Barby, Abraham de Gersdorf, qui lui avait rendu d'éminents
services dans ses négociations politico-religieuses, souvent fort
compliquées, en Hollande, à Berlin, à Londres et
ailleurs, si bien qu'il avait reçu de Zinzendorf le titre de chancelier
de l'Eglise. Quand Spangenberg, voyant approcher la fin de son collègue,
lui demanda: " Mon frère, comment vas-tu ? " -
" Admirablement ", lui répondit le mourant, et
il rendit l'esprit.
Séparé de ces grands selon
le monde par sa position sociale, autant qu'il leur était étroitement
uni par la foi et une fidélité à toute épreuve
dans le service de Christ, Georges Schmidt, l'apôtre des Hottentots,
termina ses jours, en 1785, à Niesky, où, modèle
d'humilité, il avait passé le soir de sa vie comme manœuvre
et fossoyeur. On le trouva mort, à genoux dans sa chambre, entre
onze heures et midi. Quittant son petit jardin, il s'était retiré
pour accomplir un engagement à la prière qu'il avait pris
avec quelques amis. On a supposé, avec raison, que les derniers
soupirs de Georges Schmidt ont été pour l'Afrique dont il
avait été le premier missionnaire protestant. (1)
A peine, en effet, eut-il fermé les yeux, que de nouveaux et grands
horizons s'ouvrirent pour la Mission dans le continent noir.
L'année suivante, 1786, après
quarante années environ de fidèle activité dans l'Eglise
de l'Unité, Jean-Frédéric Köber entra dans la
joie de son Seigneur. Homme d'affaires, très perspicace, d'un caractère
véhément, il n'était pas moins pour cela humblement
dévoué à Christ, sans lequel jamais il n'entreprit
rien, et qu'il confessa courageusement devant chacun. De là, la
valeur des services immenses qu'il lui fut donné de rendre à
l'Eglise, à l'époque de son organisation et an milieu de
difficultés extrêmes. Le 7 août au soir, après
quatorze semaines de grandes souffrances, se souvenant avec actions de
grâce d'un anniversaire important, il se fit lire quelques cantiques
d'adoration et de foi. Mais tout à coup, interrompant le lecteur:
" Cessez ", cria-t-il à haute voix, "
je ne supporte pas tant de joie." - Le lendemain, vers midi,
il expira.
Le coup qui frappa l'Eglise le plus sensiblement,
fut la mort d'Auguste-Gottlieb Spangenberg, survenue à Berthelsdorf
près Herrnhut, le 18 septembre 1792. Depuis le décès
de Zinzendorf, les Frères n'avaient pas, fait de perte plus grande.
Malgré son âge avancé
(il était né le 14 juillet 1704), Spangenberg, jusqu'au
13 novembre 1791, jour où pour la dernière fois il parla
en public à Herrnhut, n'avait cessé de vaquer à ses
fonctions dans le directoire de l'Eglise. On aurait été
tenté de dire de lui, comme de Moïse: Sa vue n'était
point diminuée et sa vigueur n'était point passée.
A partir du printemps 1792 cependant, des accès de suffocation
l'obligèrent de passer les nuits assis dans un fauteuil. Il souffrait
quelquefois cruellement, mais jamais aucune plainte ne s'échappa
de sa bouche. Des amis venaient-ils s'informer de son état, il
aimait à répliquer: " Je réfléchis
à toute la miséricorde dont le Sauveur use envers moi, et
je lui rends grâces, aussi, du bien qu'il m'a fait pendant ma maladie."
Il revit soigneusement tous ses papiers, en annula une partie, rangea
en liasses et par ordre de matière ce qui pouvait encore servir,
et y mit des étiquettes. Ainsi il était prêt à
partir au premier signal du Maître. Dans une belle matinée
du mois d'août, désireux de revoir la campagne, il fit transporter
son fauteuil au milieu d'une troupe de moissonneurs. Tous vinrent entourer
le patriarche qui leur parla de son passé et du vif intérêt
qu'il avait toujours porté au bonheur des habitants de Berthelsdorf.
Montrant ensuite la riche moisson, il entonna un cantique de louange.
Puis il fit offrir aux gens un verre de bière et leur donna, en
les quittant, sa bénédiction. Adieux touchants, empreints
de cette simplicité cordiale et de cette sérénité
par laquelle s'était distingué cet homme éminent.
Très fatigué, il rentra dans
sa chambre qu'il ne devait plus quitter. Encore quelques semaines de grande
faiblesse, et le vénérable évêque, âgé
de quatre-vingt-huit ans, s'en alla en paix, après un ministère
dans l'Eglise d'à peu près soixante années.
Le jour des funérailles (23 septembre),
on donna lecture d'une notice biographique rédigée par le
défunt lui-même et destinée à être communiquée
à l'Eglise. Elle se terminait par ces mots : " Je bénis
Dieu de m'avoir permis de servir l'Eglise évangélique des
Frères pendant cinquante et quelques années. Quant à
raconter ici les voyages et les travaux accomplis par moi pour l'Eglise,
cela n'en vaut pas la peine. Ce dont je serais reconnaissant envers le
Sauveur et envers mes frères, c'est qu'ils pardonnassent et oubliassent
les fautes innombrables qui n'ont pas fait défaut dans ma vie.
D'après la grâce que Dieu nous a faite, à vous et
à moi, vous auriez pu vous attendre à quelque chose de mieux.
Que faire? Je dis du fond du cœur: Pardonne, Seigneur, comme nous pardonnons,
nous aussi! "
" Me demandez-vous, quelles
sont les dispositions de mon cœur à l'heure où j'écris
ces choses, je réponds : Je ne connais, dans toute l'Eglise de
l'Unité, pas de pécheur plus grand que moi-même. C'est
ainsi que je parais devant le Scrutateur des cœurs et des reins. Mais
ce que je sais aussi, c'est que je suis une brebis du bon Berger qui écoute
sa voix, qu'il connaît, Lui, et qui ne périra jamais. Il
lui a plu de faire de moi, misérable pécheur, un enfant
de Dieu, un temple du Saint-Esprit, un membre de son corps et un héritier
de la vie éternelle. Gloire à son plan d'amour, aux siècles
des siècles! Amen. "
Telles furent les dernières confessions
d'un homme auquel l'Eglise de l'Unité a accordé de tout
temps, à côté du comte de Zinzendorf, la seconde place
dans les rangs de ses serviteurs les plus distingués.
Sommé, en 1733, par les chefs du piétisme,
de quitter Halle ou de renoncer à ses relations avec Zinzendorf,
le jeune et savant professeur Spangenberg, tournant le dos à la
carrière brillante qui s'ouvrait devant lui, avait choisi l'exil
et s'était rendu à Herrnhut. Il y avait trouvé ce
qu'il fallait à son âme. " Je confesse devant Dieu
", disait-il en 1784, " que j'envisage mon union avec
les Frères comme le moyen dont Jésus s'est servi pour me
garder, jusqu'à ce jour, dans la vérité et dans la
droiture. "
Reconnaissant de tout le bien qu'elle lui
avait fait, Spangenberg mit à la disposition de l'Eglise toutes
les qualités de sa grande et belle nature. Il l'a infatigablement
servie, soit à l'étranger, soit dans la patrie. Aux Missions
(St-Thomas, 1736); dans l'Amérique du Nord, où il fit trois
séjours (1735, 1744, 1751-1762) et déploya une activité
remarquable dans des circonstances fort difficiles; en Angleterre (1735
et 1740), où il fonda la société pour la propagation
de l'Evangile dans le monde païen (1741); en Allemagne (1762-1792)
où, devenu membre du directoire de l'Eglise, il exerça sur
celle-ci une influence puissante à l'heure critique de l'avènement
des temps nouveaux.
Aussi bien qualifié pour la cure d'âmes
que pour des travaux littéraires (Vie de Zinzendorf, 1772-1775;
Idea fidei Fratrum, 1777-1778), esprit organisateur, mais dépourvu
de tout ce qui rappelait le monarque, constamment le même et cependant
s'accommodant aux circonstances, plein d'énergie et de courage
et tout à la fois doux et humble de cœur, toujours prêt au
sacrifice sans jamais se prévaloir de cette vertu, prudent comme
le serpent et simple comme la colombe, toujours sobre et toujours rempli
de feu sacré, Spangenberg, jusqu'à sa blanche vieillesse,
a puissamment et sagement édifié l'Eglise de l'Unité.
A l'heure du débordement malsain des
années 1745-1750, il tint ferme et ne se laissa pas ébranler.
En face de l'éblouissante richesse
du génie et de la pensée de Zinzendorf, il vit clair, abandonnant
ce qui était sans valeur et retenant ce qu'il fallait pour l'édification
du corps de Christ.En présence de la grande diversité d'opinions
et de vues qui, après la disparition du comte, se fit jour dans
le directoire et dans les Eglises, il sut ramener la concorde et la paix,
apaisant le tumulte avec autant de fermeté que d'amour.
Au milieu d'une épouvantable tempête
qu'il endura sur mer en 1737, Spangenberg s'écria: " Il
ne tombe pas un cheveu de ma tête sans la volonté de mon
Père; ce qu'il trouve bon pour moi, soit pour ma vie, soit pour
ma mort, est bien fait à toujours." Trois ans plus tard,
il ajouta : " Je suis parfaitement au clair sur ce fait qu'il
n'y a de vrai repos pour le cœur que dans le sacrifice de Christ. Quiconque
a compris que ce salut lui appartient, a le droit d'être joyeux
et content. "
Le secret de la vie si simple et si grande
qui a passé sous nos yeux se révèle dans ces deux
paroles.
Note:(1)
Si l'on excepte Pierre Hegling qui, au XVII ème siècle,
avait évangélisé l'Abyssinie.
Table des
matières
Page précédente:
L'ÉGLISE
DE L'UNITÉ ET LA CULTURE MODERNE
Page suivante: A
L'HEURE DU CENTENAIRE DE 1822
Revenir
en haut 
Accueil
| Auteurs | Biographies
| Thèmes | Réveils
| Livres/K7/CD |
Liens | Traduction |
Sentinelle 24-7 |
Vision & Historique
| Séminaires | E-mail
Copyright © 2003. Ensemble
Rebâtissons la Maison.
|