Une Banque de Ressources Consacrées au Réveil 

Accueil
 
Articles et sermons
Auteurs
Biographies
Thèmes
Réveils

Ressources
Livres
Liens
Traduction
Le Ministère
Vision & Historique
Séminaires
Sentinelle de Prière
Contact
English

 

 

Ira D. Sankey
LA PRIERE FACONNE L'HISTOIRE
par Wayne W. Porter

Traduit de l'anglais par Venance Koffi et ERM

"Nous réclamons la saine doctrine de la foi, et nous faisons bien. Ces hommes [Moody et Sankey] prêchent la saine doctrine. Nous recherchons une vie humble et intègre, nous faisons bien. Ces hommes sont intègres et humbles. Nous voulons le renoncement, eh bien ! ces hommes pratiquent le renoncement, ce sont des hommes qui connaissent le dur labeur, qui sont assidus, dépensent et se dépensent dans une œuvre qui, pour eux, n’est pas humaine mais divine. Nous voulons avoir des objectifs précis, un ultimatum dans lequel l'ego n’aura aucune place, nous faisons bien. Ces hommes ont le plus précis des objectifs précis : gagner des âmes en vue de la joie éternelle ; de plus ils ne recherchent ni récompense ni célébrité, si ce n’est l’approbation du Maître, la récompense réservée à ceux qui en amènent beaucoup à la justice." - Dr Horatius Bonar

Texte au format PDF à télécharger (218 Ko).

Introduction

Cette étude examine la vie d’un soliste, conducteur de chant et fervent serviteur de Christ vivant vers la fin du XIXème siècle : Ira D. Sankey. Nul autre que lui, à son époque, n’a probablement pu chanter le Seigneur à un aussi grand nombre de personnes. On put recenser jusqu’à 17000, réunies dans un seul bâtiment, le nombre d’âmes qui composèrent son auditoire et qu’il conduisit dans les chants.

Pendant plus d’un quart de siècle, Ira Sankey travailla étroitement avec l’évangéliste Dwight L. Moody qu’il a plu à Dieu d’utiliser admirablement. On estima à pas moins de cent millions le nombre d’individus ayant entendu l’Evangile de la bouche de Dwigth Moody tout au long de son ministère. Ira Sankey accompagna Dwight Moody durant la plus grande partie de son ministère; il draina également des foules, les attirant non seulement aux rassemblements, mais également à Christ une fois qu’elles étaient sur les lieux.

Cette présente étude scrute différents aspects de la vie spirituelle de Sankey.

Tout jeune encore, Ira Sankey se vit forcé à prendre des résolutions radicales aux retombées éternelles. Il était entièrement résolu à suivre les plans de Dieu au lieu des siens, et sa foi fut à juste titre récompensée par les bénédictions de Dieu.

Œuvrant avec D.L. Moody, Sankey passait un temps considérable au service des gens, et son désir de gagner des âmes s’accroissait de façon très significative. Il acquit une grande habilité à conduire les âmes à Christ, non seulement pendant les réunions, mais aussi dans l'évangélisation personnelle.

Ira Sankey était également un homme de la Parole, un homme de prière et un homme de caractère. Son caractère devint clairement visible dans ses décisions financières, car, de façon récurrente, il sacrifiait son profit personnel en vue de l’accomplissement du parfait plan de Dieu pour sa vie.

Bien qu’il y eût de nombreux autres musiciens qui avaient reçu une formation plus approfondie, nul n’éprouvait autant que Sankey le désir d’être utilisé par Dieu dans un ministère de louange. A travers les solos, la pratique du chant en assemblée, les chorales et la composition, Sankey utilisa la musique pour toucher les cœurs par la Parole de Dieu. L’usage que Moody et Sankey firent de la musique a encore une grande influence sur nous aujourd’hui, et l’on apprendrait beaucoup à étudier leurs méthodes musicales et l'objectif qu’ils assignaient à ce ministère.

Ira Sankey vécut une vie heureuse et riche de signification, sans connaître de relâchement dans son service pour Christ. Son exemple nous interpelle et nous invite à mettre, de tout notre cœur, à la disposition du Seigneur Jésus-Christ, notre musique et nos vies.

 

Les décisions et les désirs spirituels de Sankey

Ira Sankey naquit de David et Mary Leeper Sankey, le 28 août 1840, dans le village d'Edinburgh, en Pennsylvanie, aux Etats-Unis. Bien que leur église fût à plusieurs kilomètres de la maison, son amour pour le chant le poussait à s’y rendre régulièrement.

Sankey releva que le tout premier souvenir qu’il garda de ce qui pouvait avoir trait à une vie sainte était lié à un vieux fermier écossais du nom de Frazer. Ce dernier avait l’habitude de prendre Ira par la main pour le conduire, en compagnie de ses propres enfants, au vieux bâtiment scolaire où se tenait l'École du Dimanche. Il était modeste mais avait un grand cœur très chaleureux, et il était aimé de tous les enfants. Bien des années plus tard, Sankey pouvait encore le voir prier, debout, pour les enfants. Bien que Sankey n'acceptât Christ comme Sauveur que quelques années plus tard, ses premières impressions sur la foi lui vinrent de Monsieur Frazer, alors qu’il était encore très jeune.

Lorsqu'Ira eut seize ans, on l’invita à participer à des réunions de réveil dans une église appelée The King's Chapel, située à environ cinq kilomètres de sa maison. Bien qu’il y prît part tous les soirs, il ne s’y intéressait pas réellement. Il s’asseya en compagnie d’autres garçons, et ensemble ils dissipèrent leur ennui par des chuchotements et en lançant des bouts de papier. Un soir, cependant, un ancien de l’église, un homme âgé, s’approcha de lui, au moment de l'appel et lui parla du salut de son âme. Bien qu’Ira ne réagît pas, le vieil homme continua, après cela, de lui parler tous les soirs. Finalement, Ira s’avança et formula une prière de repentance, mais il n’était toujours pas satisfait. Après plusieurs nuits et de nombreuses et longues sessions, Ira finit par recevoir l’assurance de son salut.

Ayant accepté Christ dans sa jeunesse, Sankey affirma, plus tard, que sa voix fut très tôt consacrée au Seigneur. Le résultat en fut qu’il continua à mettre ses capacités musicales au service du Seigneur dans les églises, lors des conventions et des rencontres de la YMCA (Youth Ministry Christian Association), ministère auprès de la jeunesse.

A l’âge d’environ vingt ans, on l’établit responsable d’une classe hebdomadaire d’adultes âgés de soixante à quatre-vingt ans. Mis face à ses devoirs, cette responsabilité l’amena à étudier sérieusement les fondements de sa propre foi dans le Seigneur. Réalisant que, comme bien d’autres, il avait placé les sentiments avant la Parole de Dieu, il décida d’étudier la Bible avec une détermination sans précédent.

Après une brève période de service militaire, Sankey prit une décision spirituelle vitale concernant le mariage, en se mariant à une chrétienne pieuse, membre de la chorale. A peu près sept ans plus tard, Ira ferait face à une autre des plus grandes décisions de sa vie, après avoir rencontré Dwight L. Moody.

En 1870, Sankey fut envoyé comme délégué à la Convention Internationale de la YMCA d'Indianapolis. Il avait entendu parler de Moody et fut heureux d’apprendre que ce dernier y serait aussi. On annonça que Moody qui n'était pas intervenu durant les tout premiers jours et que Sankey n’avait ni vu, ni entendu encore, conduirait une réunion de prière matinale à l’Eglise Baptiste à six heures précises. Dans son autobiographie, Sankey décrit cette prière matinale dans les termes suivants :

"J’étais quelque peu en retard, et je pris alors place, non loin de la porte, près d’un pasteur presbytérien, le Révérend Robert MacMillan, délégué originaire de mon propre comté, qui me confia : "Monsieur Sankey, ici, les chants ont été abominables; si seulement vous pouviez entonner quelque chose dès la fin de la prière de cet homme, si, bien sûr, la prière se termine." Je lui en fis la promesse et quand la possibilité s’offrit à moi, j’entonnai l’hymne bien connu : There Is A Fountain Filled With Blood (Il y a une fontaine remplie de sang). L’assemblée, se joignant à moi, l’entonna d’un cœur fervent, et la rencontre sembla prendre de meilleures couleurs.

A la fin de la rencontre, Monsieur MacMillan me dit : "Je voudrais vous présenter à Monsieur Moody." Nous rejoignîmes alors la petite file de personnes qui allaient lui serrer la main. Je venais ainsi de rencontrer, pour la première fois, l’homme avec lequel, par la providence divine, j'allais m’associer le reste de mes jours, c’est-à-dire pendant environ trente ans.

Les premières paroles de Moody, après que je lui fus présenté furent : "D’où êtes-vous originaire ? Êtes-vous marié ? Que faites-vous dans la vie ?" Quand je répondis que j’habitais en Pennsylvanie, que j’étais marié, que j’avais deux enfants et que je travaillais pour le compte du gouvernement, il dit de façon abrupte : "Vous devriez abandonner tout cela."

Je fus stupéfait, incapable de comprendre pourquoi cet homme m’avait dit que j’aurais à abandonner le poste qui m’était pourtant favorable. "Pourquoi ?" lui demandai-je. "Venez à Chicago pour m’aider dans ma tâche." Telle fut sa réponse.

Lorsque je lui laissai entendre que je ne pouvais abandonner mon travail, il répliqua : "Vous devez le faire; cela fait huit ans que je vous cherche." Je lui demandai du temps pour réfléchir et lui confiai que, pour l’instant, je n’avais aucune intention de quitter mon poste. Il me parla de ses activités religieuses à Chicago, et conclut en disant que ce qui lui causait le plus d’ennui lors de ses réunions était l'interprétation des chants. Il me confia qu’il ne savait pas chanter lui-même et, de ce fait, devait dependre de toutes sortes de personnes pour conduire les moments de chant; que souvent, après avoir prêché à une foule de personnes, et qu’il était sur le point de faire le plein du filet, quelqu’un entonnait un hymne sur une mauvaise tonalité, ce qui bouleversait la réunion tout entière.

Monsieur Moody me demanda alors si j’acceptais de prier avec lui à ce sujet, et, cette fois-ci, j’y consentis – par simple politesse. Après la prière, je retournai dans ma chambre, fortement marqué par la prière de Moody, mais toujours indécis." (1)

Durant tout ce jour-là et durant toute la soirée, Sankey n’avait cessé de penser aux paroles de Moody, mais au petit matin du jour suivant, il optait toujours pour son poste au gouvernement et pour sa situation sécurisée qui lui garantissait son salaire. Ce même matin, Sankey reçut une invitation de l’évangéliste l’invitant à venir à un certain coin de rue, dans la soirée, à dix-huit heures. Sankey s’y rendit avec quelques amis, puis Moody arriva quelques minutes plus tard.

Tout en continuant à parler, Moody entra dans une épicerie toute proche et demanda à utiliser un gros caisson pendant seulement quelques instants. La permission accordée, il emporta le caisson dans la rue et demanda à Sankey de s’y tenir debout et d’entonner quelque chose.

Sankey chanta  Am I A Soldier Of The Cross? (Suis-je un soldat de la croix ?), et en un court instant, une grande foule s’assembla autour de lui (dans un témoignage, environ trente ans plus tard, Sankey affirma que plus de trois cents personnes les avaient entourés). Quand il s’aperçut qu’il avait un auditoire, Moody monta sur le caisson et se mit à prêcher. Les ouvriers des usines et des moulins rentraient précisément chez eux après leur journée de travail et beaucoup s’arrêtèrent pour l’écouter. La foule, qui se tenait debout, était figée sur place sans pouvoir dire un mot, et Sankey affirme que l’effet des paroles de Moody sur la foule était quelque chose de merveilleux à voir. Après avoir parlé pendant vingt-cinq minutes environ, il annonça que la rencontre se poursuivrait à la Maison de l’Opéra (Opera House), et il invita l’auditoire à les y accompagner tandis que Sankey et ses amis leur ouvriraient la voie en chantant un hymne connu. Il chantèrent Shall We Gather at the River (Nous rencontrerons-nous à la rivière ?). Ensemble, ils traversèrent les rues, suivis de plusieurs personnes qui, emportées par le sermon de Moody prêché sur le caisson de l’épicier, leur emboîtèrent le pas.

Ils entrèrent dans l’Opéra qu’ils remplirent de fond en comble. Après que Moody se fut assuré que les ouvriers étaient tous assis, Sankey entendit Moody prêcher comme jamais il ne l’avait entendu prêcher auparavant. Au moment où les délégués de la convention arrivaient à la session du soir, Moody conclut la réunion en disant :

"Nous sommes maintenant dans l’obligation de mettre fin à ce moment puisque nos frères de la conventions souhaiteraient venir discuter sur la question de savoir comment atteindre les foules." (2)

Voilà un homme qui, avec succès, pouvait atteindre les foules tandis que d’autres ne font qu’en parler.

Lorsque Moody demanda de nouveau à Sankey de travailler avec lui, Sankey resta toujours indécis. Moody insista encore mais Sankey refusa de s’engager. Il répéta une nouvelle fois qu’il devait rentrer à la maison pour prier à ce propos. Mais intérieurement, il souhaitait que le Seigneur le conduisît à rester à New Castle. Toutefois, il était ouvert aux directives du Saint-Esprit.

Une fois rentré chez lui, Sankey expliqua la proposition de Moody à sa femme qui, à son tour, en fut très ébahie. Ils prirent le sujet à cœur et prièrent ensemble pour cette décision importante. Six mois après son retour chez lui à New Castle, et suite à beaucoup d’insistance de la part de Moody, Sankey accepta de passer une semaine avec lui à Chicago. Un peu plus tôt, il avait confié à sa femme que ce serait pure folie pour lui d’abandonner son travail actuel. Lorsqu’il partit, elle attendit avec anxiété la décision qu’il allait prendre.

Arrivé à Chicago, Sankey participa aux cultes familiaux tenus dans la maison de Moody et s’imprégna de l’atmosphère de piété qui y régnait. Ensuite, il commença à faire des visites avec Moody. Moody visitait beaucoup de malades à ce moment là, et il demanda à Sankey de chanter pour eux. En plus des visites aux malades, ils achevèrent la semaine par une série de réunions comprenant les réunions de prière du midi, des réunions d'évangélisation et une réunion de masse à Farwell Hall. A ce rassemblement, Sankey chanta son premier solo interprété lors d'une des grandes réunions d’évangélisation organisées par Moody.

Comme Sankey devait partir le lendemain matin, Monsieur Moody lui dit :

"Tu vois que j’avais raison; tes chants ont été utiles durant toutes les réunions et j’ai la conviction que tu devrais venir sans tarder à Chicago et abandonner ton travail." (3)

En retournant chez lui, Sankey espérait que quelque chose surviendrait qui le retiendrait à New Castle. Certes, il ne voulait pas entraver les efforts d’évangélisation que Moody déployait dans l’œuvre de Dieu, mais il se disait que ce dernier pouvait faire appel à d’autres chantres susceptibles de saisir cette opportunité de travailler à ses côtés. De plus, son église, qui enregistrait déjà une véritable croissance grâce à sa musique, avait besoin de lui. Il se demandait ce qui pourrait bien arriver à son groupe d’étude biblique et à sa chorale s’il devait partir. Il devait également tenir compte de l’entretien de sa famille. Moody lui-même refusait de recevoir un salaire, mais il avait promis à Sankey mille deux cent dollars par ans. Il lui était déjà difficile de faire face aux dépenses avec son salaire annuel de mille cinq cent dollars, et qu’adviendrait-il si les gens venaient à se lasser de ses chants, ou si Moody mourait ou s'il s’en allait, ou encore s’il changeait de travail ? Ces questions, comme bien d’autres, lui traversèrent l’esprit pendant qu’il réfléchissait à la décision qu’il devait prendre.

Alors Sankey se résolut intérieurement à faire volontiers tout ce que Dieu voudrait qu’il fasse, et qu’il chercherait conseil auprès de ceux qui connaissaient le Seigneur et se laissaient conduire par le Saint-Esprit.

De retour à New Castle, Sankey consulta son pasteur, espérant plutôt l’entendre lui suggérer de rester. Cependant, après que son pasteur et tous ses amis ressentirent qu’il était clairement de son devoir de partir, Sankey donna sa démission au Secrétaire de la Trésorerie.

Ce fut au début de l’année 1871 que Sankey et Moody se mirent à travailler ensemble à Chicago. Ensemble, ils travaillèrent sans relâche à gagner des milliers d’âmes au Seigneur Jésus par la prédication, la conquête des âmes et le chant. Par rapport à leur œuvre, il fut dit que

"ce fut une grande grâce pour D.L. Moody d’avoir croisé Ira D. Sankey dont le nom allait pour toujours être associé au sien, et qui, dorénavant, partageait ses efforts déployés dans le pays même et à l'étranger, et contribua, d'une manière dont il est impossible d'exagérer l'importance, au succès de l’œuvre qu’il allait laisser après lui." (4)

En octobre 1871, l’incendie de Chicago perturba les efforts d’évangélisation de Sankey et Moody. Toutefois, deux mois plus tard, Moody envoya un télégramme à Sankey lui demandant de venir, et ce dernier était déterminé à continuer de servir le Seigneur avec Moody. Dieu bénit considérablement leur travail à Chicago, mais Moody fit bientôt une nouvelle proposition à Sankey.

Ayant visité l’Angleterre, Moody sentit Dieu l’appeler à y retourner dans le but de tenir un certain nombre de réunions. Avec le refus de Philip Philips et de Philip Bliss de partir avec lui, il lui sembla que c’était la volonté de Dieu qu’il sollicitât Sankey.

Moody en parla à Sankey, mais, pratiquement au même moment, Philips sollicita l’aide de Sankey pour une tournée de six mois sur la Côte Ouest. Philips revenait d’Europe où il avait chanté cent nuits d’affilée durant. A ce moment là, il était le plus célèbre des chantres de l'Evangile aux États-Unis. Sankey avait un grand respect pour Philips à cause de ses talents vocaux, et parce qu’il était celui-là même qui l’avait inspiré à chanter l’Evangile. Ajouté à cela, Philips proposa à Sankey un salaire substantiel et une prise en charge totale s’il l’accompagnait à sa tournée dénommée ‘evenings of song’ (soirées du chant). Sankey accorda une sérieuse considération à cette offre car elle pouvait lui procurer bien des avantages pour son ministère spirituel et musical futur. De plus, un autre enfant était sur le point de naître, et lui et son épouse avaient besoin de l’argent que leur procurerait cette opportunité. Mais avant de prendre cette importante décision, Sankey décida premièrement d’en parler à Moody et de prier avec lui.

Sankey pria et demanda conseil à un ami auquel il avait expliqué la situation. L’ami lui fit la suggestion suivante :

"Deux ouvriers sur le même front, et surtout deux chantres, pourraient certainement ne pas s’entendre. Va avec Moody puis tu pourras accomplir ton œuvre, et lui la sienne sans qu’il y ait de situations conflictuelles entre vous." (5)

Comme il avait résolu de le faire, Sankey rencontra Moody qui expliqua que, bien qu’il n’eût pas envisagé d'itinéraire précis à emprunter pour le voyage, il avait été appelé par trois personnes dignes de confiance. Moody poursuivit en exposant les autres raisons enthousiasmantes qui le motivaient à saisir cette opportunité. Sur le plan financier, ils mettraient entièrement leur confiance en l'Éternel qui pourvoirait à leurs besoins.

Moody et Sankey fléchirent le genou pour prier. Quand le temps de la prière s'acheva, ils se relevèrent, et Sankey annonça qu’il irait avec Moody.

A propos de cette décision, tout comme de celle d’abandonner son travail, l’on dit à juste titre :

"Sankey se rendit avec Moody en Angleterre et en Écosse où il chanta en présence de la Reine Victoria, puis il reçut un nom et une couronne impérissables, à travers la moisson d’âmes gagnées à Christ au moyen de ses chants." (6)

Les aspirations spirituelles, les personnalités et l’influence de Moody et Sankey sont bien décrites dans cet extrait d’une lettre de Monsieur Horatius Bonar, éminent prédicateur et compositeur d’hymnes d'Autriche :

"Ces frères américains ne nous amènent pas un nouvel Évangile, ils ne prétendent pas non plus innover d’aucune manière dans leurs programmes; leur seule innovation réside peut-être dans le fait qu'ils donnent plus d’importance à la pratique des hymnes qui communiquent la bonne nouvelle à leur auditoire à travers cette musicalité. Nous pouvons volontiers leur faire confiance. Ils le méritent entièrement; plus nous apprenons à les connaître personnellement, plus nous les apprécions, et plus nous nous sentons solidaires d'eux et sommes poussés à partager leur sort. Nous réclamons la saine doctrine de la foi, et nous faisons bien. Ces hommes prêchent la saine doctrine. Nous recherchons une vie humble et intègre, nous faisons bien. Ces hommes sont intègres et humbles. Nous voulons le renoncement, eh bien ! ces hommes pratiquent le renoncement, ce sont des hommes qui connaissent le dur labeur, qui sont assidus, dépensent et se dépensent dans une œuvre qui, pour eux, n’est pas humaine mais divine. Nous voulons avoir des objectifs précis, un ultimatum dans lequel l'ego n’aura aucune place, nous faisons bien. Ces hommes ont le plus précis des objectifs précis : gagner des âmes en vue de la joie éternelle ; de plus ils ne recherchent ni récompense ni célébrité, si ce n’est l’approbation du Maître, la récompense réservée à ceux qui en amènent beaucoup à la justice.

Ils n’entretiennent aucunément ni funeste ni sordide dessein comme le montre leur histoire passée et comme le ressentent tous ceux qui se joignent à eux. A coté de cela, c’est en vain qu’on essaierait de les arrêter. Sans cesse ils travailleront et prêcheront, peu importe qui leur dira non. Qui s’y opposera? Travaillons avec eux.

On demanda une fois à Rowland Hill : ‘Quand avez-vous prévu de vous arrêter ?’ Il répondit : ‘Pas avant d’avoir accompli tout le travail qui nous attend devant nous.’ Il en est de même pour nos frères de Chicago. Que tout le monde dise : Amen ! Que ce monde nécessiteux dise : Amen ! Que la méchanceté humaine et la malice disent : Amen ! Que le ciel et la terre disent : Amen !

L’œuvre est grande mais le temps est insuffisant; le pouvoir de l’accomplir n’est pas humain mais divin." (7)

Le message présenté par Moody et Sankey fut largement commenté dans l’éditorial du New York Tribune en ces termes :

"…Troisièmement, en ce qui concerne leur message, ils n’ont prêché ni doctrine ni dogme d’aucune secte; rien que Christ et la nécessité que le zèle pour Son œuvre s’accroisse parmi nous. Lequel de nous nierait cette vérité ? Qu’est-ce que la religion chrétienne, sinon le seul espoir que nous ayons pour nos vies individuelles et pour la société?" (8)

Il est évident que Sankey avait entendu Moody prêcher encore à maintes reprises, mais il affirma qu’il n'avait jamais ressenti la moindre aversion de l’entendre parler.

La santé de Sankey se dégrada considérablement les dernières années de sa vie; il perdit également la vue. Ses aspirations se portèrent de plus en plus vers sa demeure finale, le ciel. George Stebbins, un proche ami de Sankey, fit la remarque suivante à propos des deux dernières années de sa vie :

"Il était évident que ses pensées et son cœur se portaient ardemment, depuis longtemps, vers son retour à la maison, car ce sujet revenait trop souvent dans nos conversations. Un jour, il me dit : ‘George, tu me trouveras à Spurgeon Street quand tu y seras.’ Souvent, à la fin de mes visites, il me disait : ‘George, je veux que tu sois à l’église (celle du docteur Cuyler, dont il avait été membre de nombreuses années durant) dimanche prochain. J’y serai car je rentre à la maison.'

Il avait tellement longtemps désiré être absent de corps pour être avec Christ qu’il en était obsédé." (9)

Fanny Crosby, une autre amie personnelle de Sankey, vécut l'expérience suivante le jour qui allait être celui de sa dernière visite à Sankey :

"Quand elle lui dit : "Les chrétiens du monde entier prient pour ton rétablissement", le malade remua la tête et lui demanda de transmettre à ses amis : "J’espère les rencontrer très bientôt, là où la tristesse et la douleur n’existent pas, et où Dieu essuiera toutes larmes de nos yeux." Ira demanda à Fanny de le rejoindre au ciel, "à la porte perlée située à l’Est de la cité. Là-bas, disait-il, je te tiendrai par la main et je te conduirai sur la rue d’or qui mène au trône de Dieu et nous nous y tiendrons debout et lui dirons : ‘Et maintenant nous te voyons face à face, sauvés par Ton incommensurable Grâce.’ " (10)

Avant que son désir de rejoindre le Seigneur ne pût s’accomplir, il plongea dans un coma tout en chantant les premières paroles de Saved by Grace (Sauvé par Grâce) de Fanny :

Un jour, le cordon d’or se brisera

Et je ne chanterai plus comme maintenant

Mais, oh quelle joie, quand je me réveillerai

Dans le palais du Roi !

A la tombée de la nuit, il était parti. (11)

Sankey était finalement en présence de Celui qu’il avait si longtemps et tant loué.

Pendant sa vie, Ira Sankey connut un succès considérable dans l’œuvre du Seigneur, mais il l'attribuait entièrement à l'œuvre du Saint-Esprit. Dès le début de son ministère, il se laissa guider et aider par le Saint-Esprit, et souvent il parlait de la plénitude de l’Esprit en lui.

Les décisions et les désirs spirituels d’Ira D. Sankey permirent à Dieu de l’utiliser pour amener des milliers d'âmes au salut en Jésus-Christ seul. Sa vie se présente comme un défi nous enseignant à attentivement considérer et suivre les directives de Dieu dans chaque décision que nous prenons.

C’est à juste titre que l’on a dit :

"Quel gâchis aurait-ce été, si Ira Sankey, l’un des plus grands chantres et musiciens de l'Evangile, était resté simplement un bureaucrate du gouvernement en Pennsylvanie - un collecteur d’impôt ! Mais tout comme Zachée et Matthieu, il y a des générations de cela, il choisit la part de Dieu et reçut à la fois une gloire séculaire et une récompense éternelle." (12)

 

Sankey et la Bible

Une des plus grandes raisons motivant Sankey à connaître la Parole de Dieu était son groupe d'étude biblique pour adultes, comme mentionné plus haut. Ce groupe se réunissait chaque semaine, et les participants y partageaient leur expérience religieuse et écoutaient les instructions données par l'enseignant concernant la marche dans la sainteté. Sankey réalisa qu'il avait mesuré son état de grâce, non pas au moyen des passages de la Bible qui ont été écrits pour décrire la condition réelle des enfants de Dieu, mais à travers ce que les autres disaient lors des diverses réunions du groupe d’étude et lors des réunions de prière. Les quelques soixante à quatre-vingt hommes qui étaient sous ses soins semblaient représenter pour lui une lourde responsabilité, et il ne voulait pas les induire en erreur. Sondant les Ecritures plus que jamais, il cherchait à prodiguer l'instruction correcte à chaque membre du groupe selon leurs besoins spécifiques. Au sujet de Sankey et de son groupe d’étude, il fut rapporté la chose suivante :

" Le groupe était dirigé sur des principes strictement bibliques; leurs membres étaient enracinés et fondés dans l'amour, se reposant non sur eux-mêmes, ni sur l'expérience des uns et des autres, mais sur les promesses sans faille de la Parole de Dieu. Il disait au groupe : "Décrivez votre condition en langage biblique. Les Ecritures abondent de descriptions de sentiments religieux de toutes sortes. Il n'y aucun état de grâce qui ne puisse être décrit par un texte de la Bible." Et les membres, ainsi instruits, furent habitués à rechercher leurs portraits dans la Bible, et également à s'enquérir des paroles de consolation ou de conseil qu'elle contenait pour qu'elles pussent être utilisées dans leurs besoins particuliers. " (13)

Après l'incendie de Chicago et durant la période de difficultés qui suivit, Moody et Sankey devinrent tous les deux plus dévoués au Seigneur et à Sa Parole :

" Ces serviteurs du Seigneur firent sortir ainsi le doux de ce qui est amer, et devinrent plus consacrés que jamais à l'œuvre de la prédication de Christ Jésus et Christ crucifié. Chacun d'eux fut plus profondément animé du désir ardent d'étudier la Bible comme étant elle-même son propre et seul interprète. " (14)

Sankey réalisa qu'il était important que l'instruction par la musique fût biblique au même titre que l’enseignement apporté dans la prédication usuelle; et qu’une fois qu'une doctrine ou une pensée était mise en musique, il était beaucoup plus probable qu'elle fût mémorisée et assimilée que si elle était simplement formulée oralement. Pour cette raison, il cherchait à composer des chants qui enseignaient clairement les vérités et les doctrines de la Bible.

A une occasion, Sankey, Moody et d'autres hommes montèrent sur quelques collines proches de l’endroit où avait lieu la convention de Northfield et eurent un pique-nique sur le sommet. Moody demanda aux hommes quelle était la montagne de la Bible qu’ils chérissaient le plus, et Sankey répondit que son choix se portait sur le Mont des Oliviers.

Lorsque Sankey eut la réelle possibilité d'entreprendre un voyage pour visiter la Terre Sainte, il avait une bonne connaissance de nombreux lieux remarquables en Palestine, du fait de son étude fidèle de la Parole de Dieu. Voyageant de lieu en lieu, il décrivit des incidents liés au récit biblique à ceux qui l'accompagnaient. A certains moments, il fut si touché par les événements historiques associés au lieu où il se trouvait qu'il s'arrêta pour chanter un chant approprié.

En 1875, Moody et Sankey furent invités à tenir une série de réunions à New York. En vue de la préparation des réunions, le sentiment des Presbytériens fut exprimé dans The New York Observer. Cet article exprime l'assurance qu'ils avaient de ce que les doctrines et l'enseignement de Moody et de Sankey étaient en harmonie avec la Parole de Dieu :

"Les hommes qui ont été invités à New York ont donné la parfaite preuve de l’efficacité de leur ministère par leurs labeurs dans d'autres lieux, et nos pasteurs savent à qui ils ont affaire lorsqu'ils demandent leur aide. Ces évangélistes ont été approuvés par les ministres et les églises qui, entre tous, auraient été les plus susceptibles de les condamner si leurs doctrines et leurs mesures n'avaient pas été en harmonie avec la Parole de Dieu et approuvées par un sain jugement. Ils ont été au milieu des communautés religieuses les plus orthodoxes et les mieux instruites en Grande Bretagne. Des pasteurs excellents, instruits et réfléchis et les plus éminents personnalités civiles, hommes d'Etat, juristes et banquiers, ont assisté à leurs réunions et ont donné leur opinion favorable par écrit.

Les presbytères, les synodes, les assemblées générales, les dignitaires de l'Eglise d'Angleterre et les fonctionnaires du gouvernement, hommes qui ne sont ni émotionnels ni enthousiastes, qui sont on ne peut plus éloignés du fanatisme religieux, attestent de la grande valeur des labeurs de ces évangélistes.

Leurs discours ont été publiés et largement lus par ceux qui désapprouvent de tels labeurs, ainsi que par leurs auditoires. "Aucun défaut constaté" est le verdict général. Ils sont comme des appels simples et scripturaires lancés aux inconvertis. La bénédiction de Dieu les a suivis, et il a plu à Dieu de les utiliser afin de détourner les pécheurs de leurs mauvaises voies, et de les amener à Christ. Nous avons également des témoignages personnels venant d'hommes remplis de sagesse qui ont été à terre un an après que les évangélistes sont partis, et ils nous assurent que l'œuvre de la grâce continue sans réaction d'insatisfaction et avec toutes les preuves d'effets bénéfiques durables." (15)

En 1889, l'année où Moody rejoignit son Sauveur, Sankey écrivit un bref résumé de ce qu'avait été la foi de Moody :

"Il s'accrochait fermement aux anciens sentiers de nos pères; il croyait à la vieille bonne Bible du début jusqu'à la fin… Je n'ai pas trouvé de nouveau chemin pour aller au ciel." (16)

En 1907, un an avant sa propre mort, il écrivit une lettre à la YMCA de New Castle, exprimant sa foi en Dieu et dans le salut tel que l'explique la Bible :

"J'éprouve une grande joie en Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu le Saint-Esprit. Ces trois sont un, et Son nom est Amour. Je crois que "Dieu a tant aimé le monde, qu'Il a donné Son Fils unique engendré, afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle."

Je crois en Celui qui a dit : "En vérité, en vérité, Je vous le dis : Celui qui croit en Moi a la vie éternelle."

Je crois dans le Fils de Dieu de toute mon âme, de toute ma force, de toute ma pensée et de toute ma force, et je suis, par conséquent, sauvé par la Parole de Celui qui ne peut pas mentir. Je n'ai plus qu'un court chemin d’obscurité sur la terre à parcourir avant d'entrer dans le soleil levant du trône du Père. Je suis si certain de rencontrer au ciel ceux de mes amis qui suivent l'Agneau, que je leur transmets ce message final que Dieu est amour. Bonne nuit, bonne nuit." [17]

 

Sankey et la prière

Dans Jérémie 33:3, Dieu déclare : "Invoque-moi et je te répondrai, je te montrerai des choses cachées, des choses que tu ne connais pas."

La façon dont Ira Sankey cherchait continuellement Dieu dans la prière nous montre qu'il croyait aux instructions données dans ce verset et les mettait en pratique.

On dit que lorsque Sankey servit à l'armée pendant trois en tant que réserviste, il servit le Seigneur de façon très active et diligente à travers des réunions de prière destinées aux soldats. Il devait certainement y avoir beaucoup de prières sérieuses durant ces jours de Guerre Civile.

Nous avons déjà vu que Sankey, alors qu’il était jeune homme, prit un certain nombre de décisions cruciales concernant l'œuvre de Dieu et le ministère que Dieu lui confiait. Lorsque Moody mit Sankey en demeure de le rejoindre à Chicago, Sankey pria à ce sujet seul, mais également avec d'autres.

Concernant les prières que lui et Moody firent, Sankey dit :

"Je présume que j'ai prié d'une manière et qu'il a prié d'une autre; pourtant, il ne lui a fallu que six mois de prière pour que Dieu me fasse quitter mon travail." (18)

Plus tard, Moody demanda à Sankey de l'accompagner en Angleterre et, une fois de plus, Sankey rechercha les directives du Seigneur dans la prière.

Dans leur travail commun pour le Maître, quelques différences entre Moody et Sankey se présentèrent comme c’est le cas dans la plupart des relations. Néanmoins, refusant de permettre à celles-ci d'obstruer l'œuvre de Dieu, ils présentaient leurs différences à Dieu dans la prière.

Le ministère de musique d'Ira Sankey n'en était pas un fondé sur sa confiance en lui-même. Sankey était conscient de son entier besoin de la bénédiction de Dieu, et la crainte qu’il avait de faire face à une situation difficile le poussait encore plus à déposer tous ses soucis aux pieds du Seigneur.

Tout jeune homme encore, lorsqu'il était à New Castle, Sankey priait continuellement pour que le Saint-Esprit bénissât les paroles qu'il chantait afin d'amener au salut de nombreuses personnes qui venaient l'écouter.

Sankey croyait fermement que, pour les chants, " l'on devrait prier autant que pour la prédication. " (19)

Mettant en pratique cette conviction, il priait pour ses propres chants tout comme un prédicateur prie pour son message. Bien souvent, Sankey chanta devant des assemblées qui généralement s'opposaient aux "hymnes humains." Néanmoins, il découvrit que si ces hymnes étaient chantés dans un esprit de prière, le Seigneur pouvait les utiliser pour communiquer la vérité de l'Evangile.

A une de ces occasions, Sankey fut spécialement soucieux de la réaction de l’assemblée, mais à travers la prière, il reçut la paix pour chanter le chant.

" Le chant en solo, quant à la question de son adéquation et de son utilité, n'était pas encore pleinement compris ni admis; ce fut donc avec beaucoup de crainte et de trépidation que nous rentrâmes réellement, cette troisième nuit, dans notre campagne de trois mois.

Lorsque je repris ma place devant l'instrument, cette nuit-là qui, à mes yeux, était la plus mémorable, je découvris, à ma grande surprise, que le Dr Horatius Bonar était assis à côté de mon orgue, juste devant la chaire. Le premier morceau de musique pour hymne chrétien que j'eusse jamais composé, écrit depuis ma venue à Edinburgh, était associé aux paroles qu'il composa - Yet There Is Room (Il y a encore de la place). 

Parmi tous les Ecossais, il était l'homme dont je sollicitais le plus les décisions. Il était, en effet, mon parfait compositeur d'hymnes, le prince parmi les compositeurs d'hymnes de son époque et de sa génération. Et pourtant, il ne chantait pas un seul de ses propres hymnes magnifiques dans sa propre assemblée, tels que " I Heard the Voice of Jesus Say " (J’ai entendu la voix de Jésus dire), ou " I Was a Wandering Sheep " (J’étais une brebis errante), parce qu'il servait une église qui croyait que seuls les psaumes pouvaient être utilisés dans les hymnes.

Avec crainte et tremblement, j'annonçai comme solo le chant " Free from the Law, Oh, Happy Condition " (Libre de la loi, oh, quelle heureuse condition).

Comme aucune prière n'avait été offerte pour cette partie de la réunion, et ressentant que l'interprétation du chant pourrait s'avérer n’être qu'une distraction au lieu d’être une bénédiction spirituelle, je demandai à toute l'assemblée de se joindre à moi dans une parole de prière, demandant à Dieu de bénir la vérité qui allait être chantée.

Dans la prière, mon anxiété fut apaisée. Croyant allègrement à la glorieuse vérité contenue dans le chant, je la chantai avec conviction à travers tout le chant, du début jusqu'à la fin.

A la fin du message de Monsieur Moody, le Dr Bonar se tourna vers moi, avec un sourire sur son vénérable visage, et étendant la main, il me dit : "Eh bien, Monsieur Sankey, vous avez chanté l'Evangile ce soir." "

C'est ainsi que la voie fut ouverte pour la mission à travers les chants sacrés en Ecosse." (20)

Sankey trouvait également que les assemblées acceptaient mieux son orgue s'il avait prié avant d'interpréter son chant.

Avant de s'asseoir pour s'accompagner lui-même avec son petit orgue Estey à cuivre, Sankey priait toujours avec l'assemblée pour que Dieu bénît son chant et utilisât la musique pour amener de nombreuses âmes affamées et perdues au salut. Cette approche intime, introduite par la prière, contribua à dissiper l'antagonisme des opposants qui haïssaient vivement l'orgue autant qu'ils haïssaient le péché. (21)

Concernant les chorales, Sankey croyait qu’elles devaient commencer et terminer leurs répétitions par la prière.

En janvier 1877, Moody et Sankey furent attendus à une série de réunions planifiées à Boston. Il y eut parmi les habitants un grand sentiment d’attente et d’anticipation, les cœurs étant désireux d’entendre Sankey chanter, et après l'annonce du chant The Ninety and Nine (La quatrevingt-dix-neuvième), Sankey fit la prière suivante :

"Notre Père céleste, au nom du Seigneur Jésus, nous venons Te voir à cet instant, Te demandant de faire reposer Ta bénédiction sur les chants qui ont déjà été chantés et qui seront chantés, dans ce grand Tabernacle. Bénis, nous Te prions, le message de Ton amour qui se trouve dans ces chants. Et nous prions, notre Père, que Tu bénisses les chantres qui viennent de venir ici, et qui viendront jour après jour, pour élever leurs voix en louange à Ton nom. Et comme dans les jours anciens, lorsque les chantres étaient appelés à faire éclater un bruit joyeux devant l'Eternel, viens à la rencontre, je T'en prie, de Ton peuple dans ce temple dédié à Ton service. Et, notre Père, ne Te demanderons-nous pas que, dans un futur proche, nous puissions même voir les fils prodigues ramenés à la maison par le Bon Berger Lui-même? Ayant erré loin de Toi, ils entendront Ta voix mélodieuse, et diront : "Je me lèverai et j'irai vers mon Père." Seigneur Jésus, bénis-nous maintenant dans tout ce que nous ferons ici, et nous Te donnerons la louange pour toujours. Amen." (22)

Ira Sankey fut un gagneur d'âmes fidèle et grandement utilisé par Dieu, et quand il parlait avec des individus, il s'appuyait sur le Seigneur pour obtenir la sagesse nécessaire. Dans son autobiographie, il décrivit une conversation avec un jeune homme qui était venu dans la salle réservée aux âmes en recherche. Lorsque le jeune homme parla de son besoin, Sankey dit plus tard qu'il éleva son cœur dans la prière afin de ne pas faire d'erreur alors qu'il s'occupait de ce jeune homme. Sankey comprenait l'importance de Jacques 1:5 : "Si quelqu'un de vous manque de sagesse, qu'il la demande à Dieu."

Le compte-rendu suivant d'une réunion de prière stimulante et touchante fut donné par Sankey :

"Mon cœur fut touché, hier soir, à la réunion des jeunes hommes. Je peux dire, en vérité, que pendant tous mes errements je n'ai jamais assisté à une meilleure réunion que celle tenue hier soir à l'église Roby Chapel — à une réunion plus remplie de l'esprit de prière et d'espérance. Je m'attends à de grands résultats depuis ce lieu.

Mon cher ami, Monsieur Drummond, y était; son père, que vous connaissez tous, a fait un si grand travail en publiant et distribuant des tracts en Ecosse, et je dois dire même, partout dans le monde. Quand Monsieur Drummond ouvrit la réunion, il demanda à tous ceux qui s'étaient convertis depuis peu de le dire. Beaucoup se levèrent et racontèrent ce que le Seigneur avait fait pour leur âme. Des hommes âgés se levèrent, des jeunes hommes et même des garçons.

Lorsque nous rentrâmes dans la prière silencieuse, Monsieur Drummond dit à quiconque souhaitait que l'on priât pour lui-même, ou pour des amis, de se lever et de le demander, tandis que les chrétiens prieraient. L'une après l'autre, de quatre coins de la chapelle, vinrent les requêtes : "Priez pour moi", "priez pour mon âme", "priez pour mon père," "pour ma mère, "pour des frères," "pour des sœurs," "pour les épouses." Mères ! Pères ! Vos fils étaient là à l'église Roby Chapel la nuit dernière, priant pour vous, suppliant Dieu pour vous. N'allez-vous pas les rejoindre?" (23)

Il est évident que la musique d'Ira Sankey était un ministère en soi et pas simplement une distraction. Sankey avait mis toute sa vie au service des autres. Il avait abandonné la sécurité financière afin que, par le chant, il pût parler aux autres de la véritable sécurité qui ne se trouve qu'en Christ. Comme conséquence de sa totale dépendance du Seigneur, ses efforts furent bénis et des milliers d’âmes sauvées.

 

Le caractère chrétien de Sankey

Tout enfant, Ira Sankey était connu par ses amis et sa famille comme ayant vécu une jeunesse honorable et honnête. Il était aussi reconnu comme un meneur parmi les garçons avec lesquels il s'associait. Ceux qui travaillaient avec Sankey dans la période où il occupait un emploi séculier, ainsi que ceux qu'il servait, avaient une très haute considération de lui.

Pendant preque dix années, il travailla pour le gouvernement, et un homme qui avait travaillé dans le bureau à côté du sien, donne ce beau témoignage à propos de Sankey :

" Dans le service civil, comme dans d'autres départements du travail, il était remarqué pour son attitude consciencieuse et pour son sens du devoir qu’il veillait à entretenir d’une façon patiente et fidèle. Dans son grade, il figurait au premier rang dans le district et avait l'entière confiance de tous les fonctionnaires et de tous les contribuables avec lesquels il avait des relations officielles.

Ses supérieurs au bureau le considéraient comme l'un des fonctionnaires les plus prompts, les plus corrects et les plus dignes de confiance qu'ils eussent, et ils étaient toujours disposés à lui accorder les honneurs d’un fidèle serviteur de la nation. Dans le long rapport qu’il entretint avec le service, jamais aucune irrégularité dans ses relations avec le gouvernement ni de dommages causés à ce dernier ne furent constatés. Il ne tira jamais avantage de sa position pour son propre compte ou pour sa propre promotion, mais se souciait fidèlement et honnêtement des intérêts du gouvernement.

C'est sur cette appréciation fort honorable qu'il quitta le service, avec le regret de ceux qui lui étaient associés.

Il trouvait aussi la faveur des gens du district dont il avait en charge la supervision officielle des affaires. Il s’était proposé, à une certaine époque, de rentrer de nouveau à l'armée afin de servir son pays; mais des quatre coins du pays, tous les contribuables qui entretenaient des relations officielles avec lui exprimèrent par courrier des remontrances instantes s'opposant à son départ du service civil, et il fut contraint de demeurer dans ce département du gouvernement, où ses services étaient si grandement demandés. " (24)

Un pasteur baptiste européen, Monsieur Rees, déclara, après avoir travaillé avec Moody et Sankey : " Ces deux frères sont véritables jusqu'à la moëlle des os. " (25)

William Hoyt Coleman également fit le commentaire suivant à leur propos : " Les deux hommes impriment en vous la claire impression qu'ils sont honnêtes et bons, chaleureux et tout entiers dans leur corps et leur pensée, et profondément fervents. " (26)

Il fut dit que Sankey avait le pouvoir de changer les vies, et que ses trente-trois années de vie sans reproche l'y avaient aidé.

En ce qui concerne l'amitié, George Stebbins affirma que Sankey " était un de ces hommes dont la compagnie est des plus appréciable, et un de ces amis les plus loyaux. " (27)

Sankey avait beaucoup de succès dans ses relations personnelles avec les gens, et il semble que cela fût spécialement vrai avec les femmes. Il usait néanmoins de beaucoup de prévenance dans ces situations, comme cela peut se voir dans ce commentaire :

" Il doit être dit avec insistance, néanmoins, que Sankey comme Moody, faisait très scrupuleusement attention dans de telles relations, et dans toute l'hostilité acharnée qui prévalait contre lui dans beaucoup de directions, je ne trouve pas une seule mention de scandale à propos du chantre, pas plus qu'à propos de son plus grand ami. " (28)

En dépit de toute la grandeur et de l'envergure mondiale de la célébrité qu'il gagna, son désir n'était rien d'autre que d'être un ambassadeur de Christ. Gamaliel Bradford fit quelques observations intéressantes à ce sujet :

" Ce qui intéresse l'observateur psychologique dans tout cela, comme avec Moody, c'est l'effet qu'il crée sur le chantre lui-même. Voilà un homme né dans une obscurité relative, qui a passé ses premières années à occuper une fonction pénible et exigeante dans un petit bureau du gouvernement.

Soudainement, il se trouve propulsé dans l'une des positions les plus visibles du monde. Il s'attire la reconnaissance de ministres distingués qui se tournent vers lui. Des hommes et des femmes de rang et de fortune le saluent humblement, et attribuent à son œuvre le plus grand confort et la plus grande satisfaction de leur vie.

Les journaux le montrent en première page. Des foules affluent vers lui, où qu'il aille, avec vive adulation, ou avec moquerie bruyante, ce qui est presque aussi stimulant et savoureux. Il est un grand homme et il le sait, ne peut s'empêcher de le savoir. Aucun acteur triomphant, ni ténor d'opéra, ni orateur public, n'a jamais galvanisé autant d'auditoires enthousiastes ou autant de louange et de flatterie. Quel en fut l'effet sur lui et comment le géra-t-il? Recherchait-il l'admiration, s'en souciait-il ou y était-il sensible? Etait-il sensible aux critiques? Son déclin relatif de ses dernières années le déprimait-il, ou bien l'ombre de la gloire passée était-elle suffisante pour que l'homme continuât à vivre?

Il n'y a pas la moindre trace d'aucune de ces choses, et encore moins qu'avec Moody, parce qu'il n'y a pas la moindre auto-analyse évidente que l'on puisse obtenir dans l'homme. Même la formule d'une telle analyse comme je l'ai suggéré plus haut aurait été rejetée avec indignation. Ils avaient résolu, par principe, d'être indifférents à toute idée de gloire et de succès mondains, cette idée avait été mise aux oubliettes. Le désir de ces hommes était d'être au service du Maître, et toutes considérations personnelles sombraient complètement loin de leur vue. Et ainsi nous entendons maintes et maintes fois dire qu'ils ne pensaient absolument pas à leur ego, et n'étaient préoccupés que de faire quelque chose pour la gloire du Seigneur. Il se peut qu'il en soit ainsi. Il est très probable qu'ils aient pensé que cela a été entièrement le cas. Tout ce que je peux dire, si ceci était entièrement vrai, c'est qu'ils étaient différents de tous les hommes auxquels j'ai été habitué, et profondément différents de moi. " (29)

En tant qu'un des amis personnels les plus proches de Sankey, George Stebbins est bien qualifié pour parler de l'authenticité de l'humilité de Sankey. Alors que Sankey était engagé avec Moody dans leur œuvre menée en Grande Bretagne, Stebbins affirme :

" Je recevais, à l'occasion, des lettres de lui couchées dans les mêmes termes cordiaux et amicaux si caractéristiques de lui, sans jamais la plus légère insinuation qu'il était conscient d'être l'un des hommes dont on parlait le plus dans l'Empire; et à son retour dans sa terre natale, après deux années d'absence au bout desquelles il avait émergé d'une obscurité relative pour atteindre une célébrité internationale, les relations amicales se pousuivirent sans jamais s'interrompre durant le reste de sa vie. " (30)

 

Foi et détermination dans les épreuves

Au début de l'année 1871, Ira Sankey quitta sa famille à New Castle pour rejoindre Moody à Chicago. Ensemble ils prêchèrent et chantèrent devant les grandes foules qui vinrent les écouter. Et en raison de la manière dont ils se complétaient, les gens commencèrent à se reférer à eux comme Jonathan et David.

Sankey avait, en effet, abandonné un bon emploi, mais dorénavant il avait découvert que le travail le plus heureux du monde était celui de conduire d'autres personnes à Jésus-Christ. Il chanta à beaucoup d'individus non-sauvés, et ceci augmenta sa passion pour les âmes.

Le dimanche soir du 8 octobre 1871, Moody cloturait son message adressé à la foule immense de Farwell Hall, en posant la question figurant dans le titre du message "Que ferais-je de Jésus?" Avant que Sankey ne chantât, Moody dit : "Maintenant, je veux que vous emportiez cette question chez vous et que y réfléchissiez, et, dimanche prochain, je veux que vous reveniez me dire ce que vous allez en faire." (31) (Moody dit plus tard que "cette déclaration fut l'une des plus grandes erreurs de sa vie et qu'il donnerait joyeusement son bras droit s'il pouvait la révoquer." (32))

Sankey termina la réunion par un hymne, mais avant la fin du troisième couplet :

Aujourd'hui le Sauveur appelle

Accours sous Son refuge;

L'orage de la justice frappe

Et la mort est proche, (33)

sa voix fur noyée par le bruit des camions de pompiers, des cloches et du grand clocher de la ville qui sonnait l'alarme.

Entendant la grande confusion au dehors, la foule devint agitée et se mit dans un état de frayeur, et Moody mit immédiatement fin à la réunion. Comme les gens partaient, Moody et Sankey sortirent du bâtiment, et purent alors voir le reflet de l'incendie sur le côté Ouest de la ville, à environ 800 mètres plus loin.

Quand il se sépara de Moody, Sankey se rendit à l'endroit où le feu brûlait, et y passa plusieurs heures tentant de contribuer à empêcher l'extension des flammes. Après avoir réalisé qu'ils ne pouvaient pas les arrêter, il retourna dans sa chambre d'hôtel et son bureau au Farwell Hall Building pour sauver ce qu'il put de ses biens. Grâce à des efforts formidables ainsi quà de multiples voyages réalisés par lui-même et par d'autres personnes dont il put louer le travail, Sankey parvint finalement à acheminer un grand nombre de ses biens (incluant sa musique) en direction du bord du Lac Michigan.

Au bord du lac, Sanley trouva quelques bateaux à rames à louer et demanda au propriétaire s'il pouvait en utiliser un. L'homme lui répondit qu'il pouvait en avoir un s'il était capable de prendre en main la situation, puisqu’il était très peu probable, pendant un certain temps, que les autorités autorisassent beaucoup de bateaux à naviguer dans cette zone. Sankey chargea ses affaires dans le bateau et rama pour s’éloigner un peu de la rive. Arrivé à un certain endroit, il put voir l'incendie se propager dans la grande ville de Chicago, et médita sur ce que cela signifiait pour son avenir.

Repassant dans son esprit toute sa carrière de chantre de l'Evangile, Sankey se remémora ses remous personnels vécus à l'époque du grand incendie de Chicago et s'attarda longuement sur le fait que le diable, d'une façon très réelle et spécifique, était venu dans sa vie et dans celle de Moody, tentant, semblait-il, d'interrompre et de détruire leur ministre réuni… La carrière de Sankey avec Moody avait à peine commencé, cette année-là, qu'elle sembla déjà condamnée à s'achever comme conséquence de la conflagration qui balaya Chicago. Assis dans le bateau, alors qu'il scrutait les étincelles, observant les flammes qui s’élevaient dans un ciel effroyablement noir, rempli de fumée, Sankey se sentit désorienté par ce qui, à ce moment précis, sembla être le dérapage d’une nouvelle carrière musicale excitante pour le Seigneur. Néanmoins, en même temps, il trouva réconfort en se rappelant les paroles de l’hymne Dark is the Night (Sombre est la nuit) de Fanny J. Crosby :

Sombre est la nuit, et un vent froid souffle,

Plus près de moi s’approche le rugissement du destructeur ;

Où irais-je, vers quel lieu m’envoler pour trouver refuge?

Cache-moi, mon Père, jusqu’à ce que l’orage soit passé.

Les paroles et le souvenir des âmes sauvées pendant sa carrière pourtant brève avec Moody relevèrent son âme. Remerciant Dieu des miracles survenus dans sa vie, il Lui demanda de continuer à le diriger dans son service pour Christ.

" Je savais que Dieu était au contrôle de la situation, " se rappela-t-il plus tard, " et qu’Il l’est toujours, peu importe où ou dans quel état nous puissions nous trouver. "

En communiquant avec Dieu dans la prière cette nuit-là – depuis un bateau naviguant sur un lac – il reçut une foi renouvelée et Dieu lui donna une nouvelle assurance que le Seigneur avait encore beaucoup de travail à lui confier. (34)

Sans entrevoir aucun avenir immédiat à Chicago, Sankey prit le train en direction de l’Est pour rentrer chez lui. Pourtant, au bout de deux mois après l’incendie qui avait détruit Farwell Hall (l’église de Moody), Moody fit ériger un nouveau tabernacle et envoya un télégramme à Sankey pour qu’il vînt le rejoindre. En dépit des efforts de Satan de contrecarrer l’œuvre de Dieu, ces hommes étaient déterminés à continuer de l’avant avec l’aide de Dieu. Concernant ce désastre et la foi de Moody et Sankey, il fut dit :

" Ce désastre au lieu d’émietter la foi confiante de ces évangélistes, la raffermit, car il ouvrit le cœur des gens pour qu’ils reçussent plus promptement leur message de l’amour du Sauveur, et fit du bâtiment un sanctuaire pour soulager les besoins physiques et spirituels d’une multitude de sans-logis. " (35)

Du fait que la nouvelle structure était construite au milieu de la section détruite, le doute subsistait quant à la question de savoir si le bâtiment se remplirait ou non. Cependant, le jour de la dédicace, plus d’un millier d’enfants vinrent.

Moody et Sankey continuèrent à tenir des réunions, en même temps qu’ils aidaient les pauvres et nécessiteux qui avaient tout perdu. Tous les deux dormaient dans un coin du nouveau tabernacle, n’ayant pour lit qu’un simple fauteuil. Souvent, les forts vents d’hiver, en soufflant, ramenaient de la neige dans leur chambre.

Avant que le nouveau bâtiment ne fût construit, Moody vécut une expérience spirituelle très spéciale, et dorénavant un grand réveil se produisit. Tant de personnes assistaient au culte qu’ils furent forcés de tenir huit réunions chaque dimanche, et beaucoup de ces personnes prirent des décisions bien fermes pour Christ. Bien que ce ne fût pas aisé, la foi déterminée de Moody et de Sankey fut récompensée par le biais des bénédictions divines. Ensemble, ils expérimentèrent la promesse de Galates 6:9 : " Ne nous lassons pas de faire le bien, car au temps convenable, nous moissonnerons. "

Tout au long de leur ministère, Moody et Sankey firent face à de nombreuses et diverses épreuves. Ces épreuves vinrent souvent sous la forme de critiques ou d’opposition dirigées vers les hommes eux-mêmes, leurs motivations ou leurs méthodes.

Dans les Îles britanniques, les gens disaient que Moody et Sankey étaient des agents haut placés de P.T. Barnum, et que Sankey était venu pour vendre des orgues américains. De surcroît, il fut affirmé et publié dans une brochure que ni Moody ni Sankey n’avaient une bonne réputation à Chicago. Quand cette nouvelle fut connue à Chicago, les ministres les plus influents de la ville rédigèrent immédiatement une lettre qu’ils signèrent et dans laquelle ils démentirent la rumeur.

A peu près à la même période, Sankey apprit que le navire qui transportait son amie Madame Spafford et ses quatre enfants avait coulé. Après avoir atteint la terre ferme dix jours plus tard, Madame Spafford transmit un télégramme à son mari qui se trouvait à Chicago, disant : " Seule sauvée. "

En entendant la nouvelle de la mort de ses enfants, Moody et Sankey eurent tous les deux le cœur brisé. Les enfants avaient tous reçu Christ comme résultat de l’œuvre de Sankey à Chicago.

Toutes ces choses affligèrent les évangélistes mais ils poursuivirent les réunions avec la force de Dieu et furent encouragés par les grands résultats obtenus. Plus d’un millier de personnes assistèrent aux réunions de prière quotidiennes, et aucun bâtiment de la ville n’était assez grand pour contenir tous ceux qui venaient entendre la Parole de Dieu lors des réunions du soir.

Sankey fut l’objet d’accusations supplémentaires liées au fait qu’il utilisait l’orgue. Certains dirent de lui qu’il était envoyé en Angleterre par une société fabriquant des orgues, qui lui garantissait un salaire élevé aussi longtemps qu’il utiliserait leurs orgues dans ses réunions. Ceci fut, bien évidemment, démenti à la fois par la société d’orgues et Sankey.

La plus grande critique faite au sujet de l’orgue, néanmoins, émana de ceux qui pensaient que l’orgue en lui-même était mauvais. Ce n’était pas en fait un problème nouveau avec Sankey, car il avait expérimenté une situation similaire dans son église à New Castle :

" Lorsque la première fois je pris la charge du chant, beaucoup de membres de l’église pensèrent que l’usage d’un orgue ou de tout autre instrument de musique pour accompagner la voix des chantres était mauvais et mondain.

On ne faisait pas objection à l’emploi d’un vieux diapason qu’il fallait faire vibrer au dos d’un recueil d’hymnes, ni à l’usage d’entonner la gamme complète à voix basse de manière à trouver la bonne clé, ni au fait que la chorale tente de trouver la note correcte dans leurs parties respectives, à l’aide de l’inoubliable " Do, Mi, Sol, Mi, Do ", avant de commencer un hymne.

Pendant plusieurs années, nous gardâmes cette manière de faire, mais, bientôt, nous vîmes que la majorité était favorable à avoir un orgue dans la chorale. Je n’oublierai jamais le jour où l’orgue fut, pour la première fois, introduit. J’eus l’honneur d’inaugurer l’instrument, et je me souviens bien avec quel soin je jouai le morceau d’introduction. Seuls un ou deux parmi les membres âgés quittèrent l’église pendant le chant. On rapporta qu’un vieil homme qui avait quitté l’église du fait de l’introduction de l’orgue, fut vu, le lendemain, au volant de son camion, traversanttra la rue principale de la ville, assis au-dessus d’un grand coffret de bouteilles de rhum, chantant à tue-tête : " Une responsabilité à tenir je dois, " etc. (36)

De pair avec l’orgue, le fait de chanter des solos fut également un objet d’opposition de la part de beaucoup en Europe. A Sunderland, en Angleterre, Sankey ne réalisait pas que le pasteur qui les accueillait était un de ceux qui manifestaient une telle opposition :

" Tout au début de la campagne, le pasteur demanda à Sankey d’aller avec lui à la maison de son trésorier, Monsieur Longstaff, l’auteur de " Take Time to Be Holy. " Rentrant dans le salon, Sankey remarqua un petit orgue similaire au sien. On lui apprit que ce dernier avait été utilisé par Philip Phillips dans une récente tournée de concerts. Ils lui demandèrent de chanter ; il s’assit donc devant l’orgue et chanta  " Come Home, O Prodigal " (Rentre à la maison, ô fils prodigue), " Free from the Law " (Libre de la loi), et " More to Follow " (A suivre). Il ne s’imaginait pas le moins du monde que le ministre, un conservateur extrême, était fortement opposé aux solos, chorales et orgues et ne les permettaient pas dans son église sous aucune circonstance.

Quand Sankey découvrit le point de vue intolérant de Monsieur Rees à propos de la musique et des instruments de musique, il fut très perplexe. Quelques jours plus tard, cependant, son anxiété disparut lorsqu’il vit de larges affiches couvrant toute la ville sur lesquelles on pouvait lire : " D.L. Moody de Chicago prêchera l’Evangile, et Ira D. Sankey de Chicago chantera l’Evangile à la chapelle Bethesda chaque après-midi et chaque soir cette semaine, excepté samedi, à 15 et 19 heures. Tous sont bienvenus. "

L’annonce avait été rédigée par le pasteur Rees ! Et ce fut dans cette déclaration que l’expression " chanter l’Evangile " fut utilisée pour la première fois. Monsieur Sankey fut spécialement impressionné d’apprendre que l’auteur de cette annonce était connu dans tout le quartier sous le nom du " pape du Nord. " (37)

Ainsi, la situation qui, au départ, avait causé beaucoup de soucis, donna lieu à l’une des meilleures références que Moody et Sankey pussent obtenir.

A une autre occasion, D. L. Moody parla du besoin pour l’Eglise d’accorder une plus grande attention à la louange. Il reconnaissait que certains ne croyaient que dans les cantiques dont les paroles venaient des psaumes et refusaient d’utiliser des hymnes " humains." Il croyait qu’ils devraient également chanter des " chants nouveaux ", qui étaient aussi bons que les sermons. De cette manière, l’Evangile pourrait être chanté et pénétrer dans les cœurs de beaucoup d’hommes. Il désirait que l’Eglise fût ranimée dans son attitude envers la louange, au lieu d’être tenue captive par des préjugés qui sont les frères jumeaux de l’incrédulité.

A Edinburgh, en Ecosse, les gens se réjouirent des magnifiques résultats obtenus dans les réunions tenues par les évangélistes, mais certains d’entre eux n’apprirent pas à apprécier les hymnes " humains " :

" Lors d’une réunion, Sankey venait tout juste de commencer un solo lorsque " la voix perçante d’une femme se fit entendre dans la gallerie, alors qu’elle se frayait un chemin vers la porte, en criant : " Laissez-moi sortir ! Laissez-moi sortir ! Qu’est-ce que John Knox penserait de ces choses là-bas? " Lorsqu’il eut fini son chant, il traversa la rue pour chanter à un rassemblement plein à craquer à l’église The Tolbooth Church. Il venait à peine de commencer à chanter que la même voix se fit entendre : " Laissez-moi sortir ! Laissez-moi sortir ! Qu’est-ce que John Knox penserait de ces choses là-bas? "

Dans son autobiographie, Sankey rapporte que sa première réunion à Edinburgh fut effectivement une période éprouvante pour lui. Moody ne put pas y être présent en raison d’un rhume sévère, ansi un autre ministre devait prêcher et Sankey conduire les cantiques.

En Ecosse, beaucoup de paroles furent prononcées et beaucoup d’encre coula à l’encontre des hymnes " humains " utilisés dans les cultes publics, et davantage encore de critiques furent émises en opposition au "kist o' whistles," terme utilisé par les détracteurs pour désigner son petit orgue. (Par consentement universel, les orgues n’avaient pas pu s’introduire dans les églises d’Ecosse pendant plus de trois cents ans).

A la suite de la prière d’introduction, Sankey demanda à tous de chanter une partie du Psaume 100. La réponse de l’assemblée fut bonne, puisque la pratique de chanter les psaumes était un terrain connu et sûr pour tous. S’ensuivirent alors la lecture de la Bible et la prière.

A cette période-là, Sankey fut confronté au problème de " chanter l’Evangile ", et pour son premier solo, il choisit Jesus of Nazareth Passeth By (Jésus de Nazareth Passe sur votre Chemin). Pendant son chant, il y eut un profond silence sur l’assemblée, ce qui était, pour Sankey, l’indication que le Seigneur pouvait même utiliser des hymnes " humains " chantés dans un esprit de prière pour apporter l’Evangile dans les cœurs des hommes d’Ecosse tout comme ailleurs. Après un puissant message et la prière finale, on demanda à Sankey de chanter un solo supplémentaire. Choisissant Hold the Fort, cantique relativement nouveau en Ecosse, il demanda à l’assemblée de se joindre à lui pour le refrain. La ferveur et la force avec lesquelles elle le chanta indiquèrent à Sankey, une fois de plus, l’utilité qu’allaient avoir les hymnes chrétiens dans le futur, à Edinburgh.

Les gens mémorisaient aisément les hymnes chrétiens, et ceci semblait importuner certaines personnes :

" De temps à autres, certains anciens des églises de Highland se sentaient un peu troublés par rapport aux hymnes de Monsieur Sankey, contrairement aux psaumes dans la version de Rouse. L’un d’eux, avec une inquiétude non dissimulée, vint trouver son pasteur, lui disant : " Je ne peux rien faire contre les hymnes. Ils sont tout le temps dans ma tête, et je ne parviens pas à les en déloger. Les psaumes ne me perturbent jamais de cette façon. "

" Alors je pense que vous devriez vous en tenir aux hymnes, " lui répondit le pasteur. " (39)

Il est apparent que les hymnes étaient efficaces pour conserver l’Evangile et d’autres vérités scripturaires dans l’esprit.

Une fois de plus, nous avons vu la foi et la détermination à la fois de Moody et de Sankey dans leurs efforts diligents de répandre l’Evangile. Ils ne se privèrent pas d’utiliser quelque chose de nouveau ou de différent, même en dépit de beaucoup d’opposition à son encontre. Pour autant que la méthode était scripturaire et utile à la cause de Dieu, ils en faisaient librement usage dans un esprit de prière.

Après la deuxième campagne d’évangélisation menée à Londres, Sankey rentra chez lui malade d’un voyage en bateau. Durant cette campagne, le fils aîné de Sankey et son père décédèrent. Commentant la réaction de Sankey à la mort de son père, Whittle écrivit :

" La réalité de la consécration de Sankey au Seigneur s’est imprimée à mon cœur lors d’un échange avec lui que j’eus cet hiver. La mort de son père fut une bénédiction dans le sens où elle l’amena plus près de Dieu, et Christ et l’Evangile sont plus précieux pour lui que jamais. Sa prière avec nous ce matin a été très réelle et bénie. " (40)

Durant ses dernières années, Sankey passa de nombreuses heures à travailler sur son autobiographie et sur les récits au sujet des hymnes. Sankey avait collecté et écrit une mine de ressources pendant des années, quand le manuscrit fut détruit dans un incendie alors qu’il était à Battle Creek. Sankey dut tout recommencer de mémoire depuis le début, et il ne put achever l’œuvre lorsque sa vue commença à rapidement décliner en janvier 1903. En dépit de ces difficultés, Sankey fut encouragé par des amis à terminer le livre, et c’est ce qu’il fit. Il a déjà été fait la remarque plus haut que, pendant les épreuves des dernières années de la vie de Sankey, ses désirs se détournèrent de façon marquée de cette terre pour se tourner vers sa demeure céleste finale. Ces moments furent des temps éprouvants pour le chantre, mais Ed Reese fit les commentaires suivants :

" Lorsque la cécité prit le contrôle de lui en 1903, il termina ses jours dans sa maison de Brooklyn, à New York, dans la rue de South Oxford Street. Durant ses cinq dernières années, il était extrêmement faible et ressentait une grande douleur du fait qu’un glaucome avait détruit le nerf optique. Sankey garda un doux esprit de patience et une pensée claire jusqu’à la fin. De tous ses amis terrestres, qui lui remontaient le moral durant ses heures solitaires, personne ne se révéla être en plus grande bénédiction pour lui que sa bien-aimée amie Fanny Crosby. Ils chantèrent, prièrent et partagèrent ensemble dans leur cécité et leurs douleurs. Combien ils se réjouissaient de savoir que bientôt ils seraient ensemble dans la gloire avec le Sauveur qu’ils adoraient, et qu’ils seraient réunis avec D.L. Moody et d’autres bien-aimés. "

Bibliographie :

(1) Ira D. Sankey, My Life and the Story of the Gospel Hymns and of Sacred Songs and Solos, (Philadelphia: The Sunday School Times Company, 1906) pp. 18-22.

(2) Sankey, My Life and the Story of the Gospel Hymns and of Sacred Songs and Solos, p. 23.

(3) Sankey, My Life and the Story of the Gospel Hymns and of Sacred Songs and Solos, p. 26.

(4) Henry Drummond, Dwight L. Moody, (New York: McClure, Phillips and Co., 1900) p. 67.

(5) Rev. W.H. Daniels, D.L. Moody and His Work, (Hartford, American Publishing Co., 1876) p. 395.

(6) Caroline Leonard Goodenough, Highlights on Hymnists, (no title page), p. 395.

(7) William R. Moody, The Life of Dwight L. Moody, (Murfreesboro, Tennessee, Sword of the Lord Publishers), p. 191.

(8) William R. Moody, The Life of Dwight L. Moody, p. 264.

(9) George C. Stebbins, Reminiscences and Gospel Hymn Stories, (New York, George H. Doran Co., 1924), pp. 119-120.

(10) Bernard Ruffin, Fanny Crosby, (n.p. , United Church Press, 1976) p. 225.

(11) Ibid, p. 226.

(12) Roger Swanson, "When Satan Lost Out to Sankey," Faith for the Family, December 1980, p. 25.

(13) Rev. W.H. Daniels, D.L. Moody and His Work, pp. 232-233.

(14) M. Laird Simons, Holding the Fort, (Philadelphia, John C. Winston Co., 1877) p. XXX.

(15) William R. Moody, The Life of Dwight L. Moody, pp. 275-276.

(16) Robert M. Stevenson, Patterns of Protestant Church Music, (n.p., Duke University Press, 1953) p.158.

(17) Charles Ludwig, Sankey Still Sings, (Grand Rapids, Michigan, Baker Book House, 1947, 1974) p. 193.

(18) Rev. J. Wilbur Chapman, The Life and Work of Dwight L. Moody, p. 124.

(19) Richard Ellsworth Day, Bush Aglow, (Philadelphia, The Judson Press, 1936) p. 160.

(20) Charles Ludwig, Sankey Still Sings. pp. 92-93.

(21) Robert M. Stevenson, Patterns of Protestant Church Music, p. 156.

(22) Elias Nason, The Lives of Moody, Sankey and Bliss, (n.p. B.B. Russell, 1877) pp. 255-256.

(23) John Hall and George H. Stuart, The American Evangelists Moody and Sankey, (New York, Dodd and Mead Publishers, 1875), pp. 316-317.

(24) Rev. E. J. Goodspeed, A Full History of the Wonderful Career of Moody and Sankey, (New York, Henry S. Goodspeed and Company, 1876), pp. 49-50.

(25) William R. Moody, The Life of Dwight L. Moody, p. 165.

(26) Ibid., p. 278.

(27) George C. Stebbins, Reminiscences and Gospel Hymn Stories, p. 212.

(28) Gamaliel Bradford, D.L. Moody A Worker in Souls, (New York, George H. Doran Company, 1927) p. 151.

(29) Gamaliel Bradford, D.L. Moody: A Worker in Souls, pp. 173-175.

(30) George C. Stebbins, Reminiscences and Gospel Hymn Stories, p. 204.

(31) Charles Ludwig, Sankey Still Sings, p. 48.

(32) Ibid., p. 48.

(33) Ira D. Sankey, My Life and the Story of the Gospel Hymns and of Sacred Songs and Solos, p. 27.

(34) Roger Swanson, Faith for the Family, p. 25.

(35) Richard S. Rhodes, Dwight Lyman Moody's Life Work and Latest Sermons, (Chicago, Rhodes and McClure Publishing Co., 1900) p. XLVII.

(36) Ira D. Sankey, My Life and the Story of the Gospel Hymns and of Sacred Songs and Solos, pp. 14-15.

(37) Charles Ludwig, Sankey Still Sings, pp. 71-72.

(38) Charles Ludwig, Sankey Still Sings, p. 95.

(39) Rev. W.H. Daniels, A.M., Moody: His Words, Work, and Workers, (New York, Boston, Pittsburgh, San Francisco, Nelson and Phillips, 1878) p. 485.

(40) J.C. Pollock, Moody, (New York, MacMillan Co., 1963) p. 248.

Référence : The Life and Music of Ira D. Sankey by Wayne W. Porter, 1983 – Chapter 1: Ira D. Sankey’s Spiritual Life.

Revenir en haut

 


Accueil | Auteurs | Biographies | Thèmes | Réveils | Livres/K7/CD | Liens | Traduction | Sentinelle 24-7 |  
Vision & Historique | Séminaires | E-mail

Copyright © 2003. Ensemble Rebâtissons la Maison.