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Félix NeffFélix Neff
LE BRAINERD DES HAUTES ALPES
par un auteur inconnu

" Comment se fait-il que, deux cents ans après sa mort, des protestants de France s'unissent pour célébrer l’œuvre d'un évangéliste qui n’avait aucun grade universitaire ni diplôme, et dont le ministère en France a duré moins de quatre ans ? Comment se fait-il qu'une des vallées les plus isolées des Hautes Alpes soit devenue le théâtre d'une puissante œuvre de Dieu, un des hauts lieux du protestantisme français et le centre d'un rassemblement annuel attirant plusieurs milliers de personnes, à Freyssinières? " ainsi s’interrogeait M. G. Williams, après un récent séjour dans ces lieux.

Félix Neff avait beaucoup de points communs avec David Brainerd qui avait œuvré parmi les Indiens d'Amérique dans des conditions primitives semblables. Tous les deux étaient jeunes. Tous les deux rentrèrent dans leur champ de travail entourés d'un nuage de fausse représentation. Tous les deux étaient animés d’esprit de sacrifice. Tous les deux restèrent célibataires. Tous les deux moururent à un âge précoce en raison d’une surcharge d’efforts et d’usure physiques dans des conditions d’extrêmes difficultés. Tous les deux expérimentèrent une œuvre de la grâce et de réveil. Tous les deux étaient des hommes de prière.

Félix Neff, d’origine suisse, naquit à Genève, le 8 octobre 1798. Tôt dans sa petite enfance, il fut privé de son père. Sa mère, bien que déiste confessante, n’interféra jamais sur Félix pour empêcher son amour pour l'église qui se manifesta tôt. Bien que ses moyens fussent limités en raison de son veuvage, elle lui donna tout ce qui lui était possible de prodiguer en vue de son développement mental. Les marques de son affection maternelle étaient soigneusement gravées dans son cœur une fois qu’il s’endormait, alors qu’elle voulait lui inculquer des qualités viriles.

" Je suivis le monde, " dit Mme Neff, " et mon union avec un homme de brillante constitution et d’esprit sceptique bientôt finit par me rendre moi-même déiste au point que je négligeasse de façon habituelle et délibérée les cultes publics. Mais il n’en était pas de même avec mon enfant. À un âge très jeune, c’était pour lui un délice d’assister aux réunions sacrées dans les églises, et non seulement était-il toujours fidèle à cette habitude, mais il était remarquable pour le sérieux de ses dispositions. Heureusement, il ne m'a jamais demandé pourquoi je n’y allais pas. "

Félix était un autodidacte en botanique, en histoire et en géographie. Par son pasteur, il acquit quelques connaissances du latin. Il était doué de la mémoire la plus prodigieuse, était absolument vrai au point que cela devienne un défaut, mais avait une volonté forte et était hautain. Du fait que l’instituteur du village local manquait d'instruction appropriée, la mère devint la tutrice de son fils.

Avant que le jeune homme n’ait atteint l’âge de treize ans, ils déménagèrent à Cartigny. Félix avait, à cette époque là, épuisé la bibliothèque dont leur maison pouvait se vanter, ainsi que tous les livres que sa mère avait pu lui acquérir. Elle fit l’effort de le placer dans une bonne école, mais sans succès. Comme il était très difficile d’obtenir du travail, le jeune adolescent remplit ses heures de loisir à étudier la vie des insectes et les arbres, et écrivit un traité sur les soins à prodiguer à ces derniers. Il poursuivit également ses études de mathématiques et de latin. Il avait lu Plutarque et Rousseau depuis l'âge de huit ans jusqu'à ses seize ans, mais leurs arguments empreints d’infidélité ne semblèrent pas l'affecter.

Mais Dieu préparait son instrument. Sa mère écrivit : " Je l'avait toujours laissé suivre ses propres inclinations. Hélas, je ne voyais pas la Main qui avait le contrôle sur nous deux, et m’amenait à l'envoyer au bon pasteur Montinie, qui très tôt apprécia son caractère et souhaita impatiemment lui être utile. Il conseilla à mon fils d’entrer à l'armée, voyant que nous étions pratiquement dépourvus de toutes ressources pécuniaires. "

Dans l’armée, par son sérieux et son application dans le travail, Félix fut rapidement promu au rang de sergent, à la grande contrariété de ceux qui s'étaient exercés beaucoup plus longtemps. Son capitaine lui dit un jour : " Si tu n’a aucune tâche à laisser aux soldats, tu n'as aucune idée du commandement. " " C’est la meilleure et la plus sûre manière de commander ", répondit le jeûne. Dès son jeune âge, il avait des idées bien déterminées sur les maux qui frappaient le monde. " Penses-tu qu’il n'y a aucun amusement au théâtre? " lui demanda un ami. " Au contraire, je pense qu'il y en a trop ", fut sa réponse.

La conviction que la source de toutes ses actions était l’égoïsme, l’amena à prier dans une grande détresse : " Oh, mon Dieu, qui que tu sois, fais-moi connaître ta vérité ; daigne te manifester à moi. " Il commença une étude diligente de la Bible, car il lui semblait qu'aucun autre livre ne pourrait déverrouiller les mystères concernant l'état irrégénéré de son cœur humain. A ses yeux, jusque là, cependant, Dieu était un juge sévère, pas un père compatissant. La compréhension spirituelle à ce sujet lui vint à travers un livre, Honey flowing from the Rock (Du miel coulant du Rocher) que lui avait prêté son pasteur. Il était écrit par un Anglais, Thomas Willcock. Le passage suivant apporta un baume au jeune homme : " Si tu connaissais Jésus-Christ, tu ne voudrais pas, pour tout l’or du monde, accomplir une seule bonne œuvre sans lui. Si tu le connais déjà, tu sais qu'il est le Rocher du salut, infiniment au-dessus de n'importe quelle propre justice. Ce Rocher te suivra partout. De ce Rocher coule le miel de la grâce, qui seul peut te satisfaire. Voudrais-tu aller à Jésus ? Renoncer à toute idée de ta propre bonté, ne prenant avec toi rien d’autre que ta misère et ton péché. "

" Voudras.-tu connaître toute l'horreur du péché ? Ne te satisfais pas d'examiner son étendue en toi-même. Va à Jésus sur la croix ; contemple dans ses souffrances la malignité du péché et tremble. Laisse l'Esprit de Dieu te guider dans l'étude de la Bible. C'est une mine dans laquelle le trésor le plus précieux est caché, la connaissance de Christ même. " Dans la marge du livre se trouvaient écrits les mots suivants : " Félix Neff a trouvé la paix ici sur les deux pages. " Et à propos de cette expérience, il écrivit : " Quand après un millier de vœux et un millier d'efforts infructueux, j'appris finalement qu'en moi ne se trouve rien de bon, je fus, en effet, heureux de tomber sur un livre qui décrivait avec exactitude et vérité l'état misérable de mon cœur et qui me montrait en même temps le seul remède efficace. Je reçus avec joie la bonne nouvelle que nous devrions aller à Christ avec toutes nos souillures, toute notre incrédulité, et tout notre cœur impénitent. "

Bien que l’énergique converti fût loin d'être satisfait de la condition spirituelle de l'Eglise nationale de Suisse, il n'était pas un séparatiste et cherchait, en tenant des réunions - études bibliques et réunions de prière - à approfondir la vie spirituelle à l'intérieur de l'Eglise établie.

Parlant de ses travaux en Suisse, il écrivait : " J'ai aidé dans les villages dans la journée, et dans la soirée des paysans se sont rassemblés pour recevoir instruction. J'ai parlé de la simplicité évangélique en opposition avec une théologie stérile. Tout le canton semble se préparer à un grand réveil, si l'on en juge au moins par l'agitation de Satan. J'ai tenu treize réunions de prière dans sept villages différents, et la moitié de la population de l'endroit y a assisté. Je visite tous les chrétiens pieux dans leurs propres maisons et ceux qui ne le sont pas encore mais qui sont en recherche. " Il voyait clairement que le monde tolèrerait que ses disciples confessent leur foi dans la Bible, mais qu’il punirait sévèrement ceux qui chercheraient à gouverner leur vie par ses préceptes. Par conséquent, partout il parlait de la nécessité d'une séparation d'avec le monde.

Ces points impopulaires auxquels le jeune prédicateur était attaché et qu’il enseignait surprirent tout d'abord les ministres, puis les mirent en rage, qui ne voulaient autoriser aucun enseignement religieux qui ne fût sous leur supervision directe. " Je remarquai ", écrivit Neff, " que je ne pouvais pas comprendre en quoi les réunions de prière, tenues sans aucun système formel, sans liturgie, ou sans la célébration des sacrements, pouvaient être d'une façon ou d'une autre néfastes aux intérêts et à la tranquillité du ministère établi. Ou bien le ministère établi reçoit son autorité des hommes, ou bien il la reçoit de Dieu. S'il la reçoit des hommes, nous n'avons pas le devoir de la respecter comme étant divine. S'il la reçoit de Dieu, qu'il prouve qu'il en est ainsi, en respectant tout ce que Dieu fait pour promouvoir l'avancement de son royaume céleste, et qu'il ne s'arroge pas le droit de prescrire à Dieu les moyens qu'il doit utiliser pour l'accomplissement de ses desseins. "

La santé détériorée de Félix Neff le força à quitter le Jura sans délai. A Neuchâtel, l'opposition qui se manifesta contre ses réunions le contraignit à noter dans son journal : " 10 janvier 1821. Permission de rester jusqu'au 5 avril. Beaucoup sont affamés, mais le Gouvernement me tolère, et le Seigneur a ouvert beaucoup de cœurs. "

Des circonstances providentielles l'amenèrent à être remarqué par M. Blanc, pasteur de Mens en France. Une entrevue fut arrangée, et Neff fit l'observation suivante : " Je lui informai que je n'avais jamais poursuivi des études suivies et que je ne devrais certainement jamais être ordonné à Genève. Il ne sembla pas penser le moindre mal de moi à cause de cela et m'invita à lui rendre visite à Mens. Il désirait même que j'y passasse quelques mois en l'absence de son collègue. "

À vingt-quatre ans, Neff quitta sa Suisse natale pour la France, où les quelques protestants avaient bien peu de pasteurs en fonction. Il travailla pendant six mois en tant qu’assistant pasteur à Grenoble, en utilisant les mêmes méthodes de réunion. A propos de celles-ci, Neff écrivait : " Je suis de plus en plus convaincu que ces réunions sont des moyens très efficaces de favoriser la piété pratique. Elles encouragent à la confiance mutuelle, l'humilité, la simplicité et l'amour fraternel. Je sais par expérience que l'état de mort et sans vie de l’Eglise dont tous nous nous plaignons est dû à nos propres fautes. Ou nous ne prions pas, ou nous ne sommes pas persévérants et assidus dans la prière. Notre cœur étant naturellement éloigné de Dieu, ce n'est pas un seul pas qui nous rapprochera de lui ; ce ne sont pas non plus quelques minutes de froide prière qui suffiront à soutenir nos âmes. "

En 1822, le jeune évangéliste déménagea à Mens et aida M. Blanc en dispensant des enseignements aux catéchumènes, qui étaient au nombre de soixante-dix. Une fois par semaine, le jeune assistant leur rendait visite, et seulement un cinquième parmi eux résidait à Mens, le reste étant dispersé dans vingt villages différents du pays qui était presque infranchissable. Il fut très déçu de ne pas découvrir " un seul un épi de blé mûr " dans un si grand champ de moisson et déplora l'esprit mondain qui y prédominait. " Il y a peu de vie spirituelle dans cet endroit ", écrivit-il, " et B. lui-même, je ne peux m'empêcher de penser qu’il semble trop satisfait d’être un protestant et de se contenter de cela. Je perçois qu’il a peur que j’établisse des réunions de prière, parce qu’il me parle souvent du danger des innovations, et d'aller trop loin. Je suis cependant reconnaissant qu'il approuve les doctrines vraies et saines de l'Evangile, et j’ai confiance que le Seigneur ouvrira encore davantage ses yeux. Quand il est invité dans la société, je n'entends rien d’autre que de la conversation mondaine, parce que B. n’introduit jamais des sujets religieux, excepté dans un but de controverse. "

L'enseignement courageux et fidèle de Neff commençait à porter du fruit. Quelques cas saisissants de profonde conviction de péché, aboutissant au salut, encouragèrent l'évangéliste. Quelque chose s’apparentant à un réveil se produisit affectant une vaste région.

Mais il y avait des régressions décourageantes. A travers une longue lettre adressée à M. Blanc, retraçant les défauts et les imperfections de Neff, un ministre de Genève avertit le pasteur de se méfier des loups habillés en agneaux. Ensuite, le ministre absent, que Neff remplaçait, revint et chercha à reprendre ses fonctions. Quelques hésitations parmi les chrétiens à accéder à sa requête eurent comme conséquence un esprit de parti, ce ministre dénigrant ouvertement Félix Neff et se moquant de ses sentiments rigides. Ceci en influença certains en lesquels Félix Neff avait eu de brillants espoirs. Environ cent familles, craignant que leur fidèle catéchiste ne les laisse, proposèrent de rassembler des appointements en sa faveur. Celles-ci le considéraient comme un saint, mais leurs éloges blessèrent Neff autant que les fausses déclarations du ministre.

M. Blanc était en très bons termes avec ce jeune assistant sur qui il déchargeait quelquefois son cœur. Même les réprimandes que Neff administrait de temps en temps étaient reçues d'une façon aimable, parce que M. Blanc en était venu à reconnaître la solide valeur du jeune homme, qui ne se laissait pas décourager par un climat défavorable et qui ne pensait jamais à lui-même.

En résumant le ministère de Neff à Mens, M. Blanc écrivit :

" Pendant son séjour parmi nous de presque deux ans, il a été un instrument de Dieu apportant le plus grand bien. L’ardeur pour la religion a augmenté ; beaucoup de gens ont été amenés sérieusement à penser à leurs âmes immortelles ; la Bible a été plus profondément recherchée et plus attentivement lue ; les catéchumènes ont été mieux informés de leurs devoirs chrétiens et leur conduite s’est améliorée ; le culte familial a été établi dans beaucoup de maisons ; l'amour du luxe et de la vanité a diminué considérablement ; des écoles ont été fondées ; une amélioration évidente s’est produite dans les manières de vivre et les habitudes de travail de nos protestants.

" Doué de grandes capacités naturelles, particulièrement d’une mesure d'éloquence peu commune et ayant son cœur brûlant d’amour pour son sauveur, il prêchait plusieurs fois au cours de la journée mais ne répétait jamais le même discours. "

Afin d’être plus acceptable par l’Eglise de France, Neff rechercha l'ordination. Mais il ne pouvait pas la recevoir là, en raison de ses irrégularités dans les études. Il présenta donc sa candidature à un corps de pasteurs des assemblées indépendantes d’Angleterre qui accéda à sa demande. A son retour d'Angleterre, Neff apprit que des soupçons concernant son ordination à l'étranger s’étaient répandus. Il fut faussement dépeint comme un ennemi caché lié par des connexions religieuses avec l’étranger, et qui disséminait de nouvelles doctrines. Le magistrat local fit en sorte de recueillir des faux témoignages décriant les réunions de Neff, et requit que celles-ci fussent interrompues, aussi Neff dut-il regarder ailleurs pour trouver un champ de travail. Il prêcha son sermon d'adieu sur le texte suivant : " C’est par beaucoup de tribulations qu’il nous faut entrer dans le royaume. "

Tournant ses pensées vers les Hautes Alpes, Neff écrivit : " Au milieu des Alpes, je devrais être le seul pasteur. Dans le Sud, je devrais être entouré de pasteurs, dont beaucoup d'entre eux sont en bons termes avec le monde, et je devrais être constamment ennuyé. "

Après beaucoup de difficultés pour obtenir sa naturalisation et le droit de travailler, l'ardent évangéliste, finalement, à l'âge de vingt-six ans, démarra l'œuvre pour laquelle on se souvient le plus de lui. Pendant quelques années, afin de nourrir le troupeau de Dieu dispersé, il voyagea constamment de long en large, traversant les dangereux passages menant aux paroisses situées dans les endroits les plus élevés et les plus froids de toute la France.

Un de ses voyages, décrits dans son journal, nous donnera quelques aperçus des difficultés qu'il rencontrait lors de ses déplacements. Le temps était orageux ce jour-là, et les villageois supplièrent le jeune ministre de ne pas traverser le col par un temps pareil. Mais Neff, sentant qu’il devait prêcher à Dormilleuse à l'heure fixée, se procura un guide et, armé d'un grand bâton, s'approcha de la montagne.

" Seule la plume du poète peut décrire le panorama magnifique et plein de majesté ", écrivait-il. " La neige nous arrivait jusqu'au genou. Un orage de grêle, accompagné d'un vent très coupant, s’associait aux coups de tonnerre et aux roulements des avalanches tombant des plus hauts rochers. Les éclairs et les rayons de lumière éclataient au-dessus et en-dessous de nous, et l'amoncellement de la neige menaçait de nous submerger. "

" Heureusement, tout cet orage était derrière notre dos, et il y avait un précipice à côté de nous. Nous n'étions pas, par conséquent, réellement en danger. Finalement nous atteignîmes le col où nous trouvâmes une épaisseur de neige d'un mètre et un vent insupportable. Nous arrivâmes au point de descente, et là je pris congés de mon guide et continuai à descendre, enfoncé toujours dans la neige à hauteur du genou. Un brouillard se leva, et je pus tout juste voir les pointes des rochers s'illuminer avec les rayons de soleil. Je chantai alors quelques paroles de " Te Deum " et, accélérant mes pas, je découvris les traces de quelque brebis amenée dans la vallée par la neige.

J'arrivai avant le levé du jour à Dormilleuse où ils ne furent pas le moins du monde surpris de me voir. "

Dans une lettre adressée à un ami, il décrivit l'environnement historique et moral des gens parmi lesquels il travailla. " Ce village (Dormilleuse), le plus haut dans la vallée de Freyssinières, est célébré pour la solide résistance que ses habitants, pendant plus de soixante ans, ont opposée aux empiètements de l'Eglise de Rome. Ce sont les descendants par lignée directe, libres de tout adultère spirituel, des Vaudois et ils n'ont jamais plié le genou devant Baal. "

" Les restes des fortifications et des murs qu'ils avaient construits de manière à ne pas être pris par surprise par l'ennemi sont encore visibles. Et la nature pratiquement inaccessible de leur pays était aussi un moyen efficace pour leur préservation. La population de ce village est entièrement protestante, tout comme celle des autres villages de la vallée. L'aspect de cette contrée, autrefois terrifiant et sublime, qui servit d'abri à la vérité tandis que le reste du monde reposait dans les ténèbres ; la mémoire de ces anciens et fidèles martyrs, dont le sang aujourd'hui encore tache les rochers ; les profondes cavernes où ils allaient se réfugier pour lire les Ecritures et adorer le Père des lumières en esprit et en vérité - tout ceci avait tendance à élever l'âme et à exciter les sentiments et les émotions d'une manière telle qu'il est impossible de le décrire. "

" Mais ces pensées laissent bientôt place au chagrin, lorsque le regard de l'esprit s'arrête sur la condition présente des descendants de ces anciens descendants de Jésus crucifié. Ils sont dégénérés dans tous les sens du mot. Et leur état rappelle au chrétien que le péché et la mort sont tout ce que les fils d'Adam peuvent réellement léguer à leurs descendants. Et hélas cet héritage est inaliénable. "

" Un grand respect pour les Ecritures demeure néanmoins parmi eux et nous devons garder espoir qu'ils sont toujours " des bien-aimés pour l'amour de leurs pères " et que le Seigneur fera que sa face brille sur ce lieu qu'il s’est choisi comme son sanctuaire. "

" L'œuvre d'un évangéliste dans les Hautes Alpes ressemble à celle d'un missionnaire parmi les sauvages, le degré très primitif de civilisation presque identique dans les deux cas qui prédomine parmi ces deux populations étant un grand obstacle aux travaux missionnaires. Parmi les vallées, sous ma charge, le niveau de civilisation de Freyssinières est le plus en retard. Architecture, agriculture, instruction de toutes sortes sont à leur stade très primitif. "

" Beaucoup de maisons sont sans cheminées, et beaucoup ne possèdent pas de fenêtres. Toute

la famille, durant les sept mois que dure l'hiver, se cantonne dans l'étable qui n'est nettoyée qu'une fois par an. Leur manière de s'habiller et leur alimentation sont également grossières et ne sont pas saines. Leur pain qui est fabriqué une seule fois dans l'année consiste en seigle le plus vulgaire. S'il arrive que l'un d'eux tombe malade, ils n'ont pas de médecin et personne pour leur administrer soit des médicaments, soit de la nourriture même périmée. Celui qui est invalide peut se considérer lui-même heureux s'il peut obtenir quelques gouttes d'eau. "

" Les femmes sont durement traitées comme dans les peuples demeurant encore à l'état barbare. Elles s'assoient rarement, mais généralement s'agenouillent ou s'accroupissent par terre. Elles ne s'assoient jamais à table ou mangent avec les hommes qui leur donnent un morceau de pain au-dessus de leur épaule sans regarder autour - une pitance misérable, qu'elles reçoivent sur une pauvre attitude de révérence, baisant la main du donateur. "

" Les habitants de ces villages mélancoliques étaient si sauvages quand je vins la première fois parmi eux qu'à la vue d'un étranger, même un passant, ils s'enfuyaient dans leurs huttes. Les gens participaient à la corruption générale autant que la pauvreté pouvait le leur permettre. Le jeu, la danse, les jurons et les querelles se rencontrent ici comme ailleurs. "

" Il se trouve rarement une maison qui puisse protéger contre les chutes de neige et des morceaux de rocher. Je fus pris d'une affection particulière pour cette vallée et ressentit un ardent désir de devenir, en quelque sorte, un Oberlin en faveur de ces pauvres gens. Malheureusement je ne fus pas capable de passer plus d'une semaine avec eux dans l'intervalle d'un mois. "

Félix Neff, dans sa courte période de service, aida à construire des écoles et des temples pour le culte. Il enseigna également des méthodes améliorées de culture de pommes de terre et introduisit l'irrigation, contribuant à la construction de ses infrastructures. Il fonda des écoles et établit des professeurs, mais c’était pour le rafraîchissement spirituel de ce peuple qu'il travailla le plus. Un authentique mouvement de l'Esprit fut remarqué quand il visita Freyssinières. C’était comme si la vallée entière s'était rassemblée, et un climat de solennité et de crainte respectueuse reposait sur l’assemblée tout entière. Se rendant dans d'autres villages, il fut témoin de preuves supplémentaires d’une visitation de l'Esprit.

" Tout le peuple semblait se consacrer à la lecture, à la méditation et à la prière ; les jeunes tout particulièrement semblaient animés par un esprit de piété ; une flamme céleste paraissait s'être communiquée de l'un à l'autre. Je trouvai à peine trente heures de repos pendant la semaine. "

" Je suis frappé d’étonnement devant l’apparente soudaineté de ce réveil. Je pouvais à peine en croire mes yeux. Même les rochers, les cascades et la glace paraissaient animées de vie et offraient à mes yeux une perspective bien moins morne et sombre qu’autrefois. Ce pays sauvage m’est devenu cher et précieux, maintenant qu’il est devenu l'habitation de frères chrétiens. "

Les efforts exténuants de cet humble ambassadeur de Christ étaient devenus un lourd tribut. Écrivant dans son journal, il fit la remarque suivante : " Mes voyages alpestres constants étaient à la fois douloureux et dangereux, à cause de la sévérité de l'hiver. Les constantes douleurs internes et l'indigestion m'ont obligé à pratiquer l’abstinence mais qui était mal assortie à la fatigue et au froid auxquels j'ai été exposé. Mon estomac s’est raisonnablement affaibli par la nourriture grossière et l’irrégularité de mes repas, et peut-être à un certain degré aussi, par le manque de propreté des ustensiles de cuisine utilisés dans ce pays. Je me suis bientôt rendu compte qu'il était absolument nécessaire de chercher une assistance médicale – assistance qu’en dépit de toute leur bonne volonté, ces pauvres montagnards ne pourraient pas me procurer. "

En 1827, à l’âge de seulement vingt-neuf ans, le jeune homme malade quitta ses bien-aimés pour Genève. Pendant les premiers mois de repos, il attira tellement de monde autour de lui que les gens ne purent pas croire qu’il était malade. Mais une rechute survint vers le printemps. Elle l’affecta tellement que de vieux amis le reconnurent à peine, et les étrangers confondirent sa mère avec son épouse, bien qu'elle fût âgée de soixante-sept ans. En passant en revue ses années de labeur, l'infatigable ouvrier pouvait voir comment il avait surmené son corps par des labeurs incessants.

" Cette interruption de mon activité est une épreuve que je mérite bien. J'ai souvent craint, au milieu de ma plus grande vigueur, de trop placer ma confiance dans ma force et de trop me satisfaire dans la puissance de l'action que rien ne semblait capable d’interrompre ou de se lasser. Ainsi j'ai couru le risque de me trouver, un jour, en être privé, pour mon bien-être spirituel. "

Combien de fois dans ces jours de repos forcé il aspira à retourner dans les Hautes Alpes. " En esprit, " écrivit-il, " je revisite souvent vos vallées et désire ardemment être capable de supporter le froid et la fatigue, dormir dans une étable sur un lit de paille, afin de proclamer la Parole de Dieu. Mes paroles vous ont souvent lassés, et la simplicité et la franchise de mon langage vous ont souvent offensés, et bon nombre d'entre vous m’ont vu partir avec joie. Mais si j’étais encore parmi vous, je ne devrais pas changer de langage. La vérité est inchangeable. Je vous supplierais encore, au nom de Jésus, de vous réconcilier avec Dieu. "

Aucun murmure ne fut entendu de ses lèvres pendant ces longs, longs mois de maladie. Pendant les dernières semaines de sa vie, il supporta l’agonie et ne put pas s’empêcher de lire ou de recevoir des visiteurs. On l’entendit chuchoter : " Victoire, victoire, victoire en Jésus le Christ, " tandis que la fin s'approchait. Félix Neff quitta alors la scène de ses brefs labeurs pour recevoir le " C’est bien " du Maître.

Quel était le secret de la résistance de ce jeune homme à de telles privations, à un tel dur travail et à une telle incompréhension de ses semblables? Tôt dans sa vie chrétienne, il avait compris qu'aller " en dehors du camp " est le sort de chaque chrétien consacré. Il s’était armé de la pensée que nous devons connaître également les mêmes douleurs que Christ.

Écrivant en toute franchise à son proche ami, M. Blanc, il révèle son attitude intérieure vis-à-vis de ce sujet. " Je t'ai souvent dit pourquoi tu trouves si difficile de supporter la haine, le mépris et la perfidie du monde. C’est parce que tu ne peux pas te faire à l’idée qu'il doit en être ainsi, et que cette lutte continuelle est inséparable de l'Evangile. C’est, parce qu’en entrant dans le ministère, tu n’as pas pris en compte ce point, mais que tu as plutôt compté sur l'estime des hommes, sur la facilité et le confort du monde. Mon cas est différent. "

" Quand mes yeux se sont ouverts la première fois à la lumière éclatante de l'Evangile, ce fut un moment critique, et je n'ai rien vu d’autre que la rage et la fureur du loup contre les brebis du bon Berger. Je ne pense maintenant en rien à la petite opposition que je rencontre. Néanmoins, je souhaite ne pas me vanter, car si, par la grâce de Dieu, j'ai quelque force, je n’en possède que peu en comparaison avec d'autres ouvriers mille fois plus fidèles que je ne le suis. Et en outre, j'ai tant de causes d’humiliation que je dois être pire qu'un imbécile si je m'estime sur quelque base que ce soit. "

" Lui qui est venu pour nous ouvrir le royaume du ciel était loin d’avoir son chemin terrestre jonché de roses et ne trouva que peu d'honneur et de respect. "

" Ne parle pas, je t’en supplie, " d'une fin à tout cela ", de " Satan ayant été vaincu ", etc.. Soit baisse les bras et soumets-toi immédiatement à l'ennemi, soit résous-toi à une vie de guerre. Si la paix extérieure devait t'être accordée, je devrais craindre que la vie spirituelle expire bientôt. La paix parfaite en ce monde est la mort au nouvel homme. Pour notre chair - aucune paix, aucun repos, aucun honneur, aucune estime. "

Citations de Félix Neff

" Demeurez en moi. Il n'est donné à aucune créature d'avoir la vie en elle-même. C’est seulement en proportion de ce que Christ habite en nous, et nous en lui que nous avons une quelconque vie réelle en nous. "

" A ceux dont la vie spirituelle est devenue graduellement faible et languissante, je dis sans hésitation que ce mal vient de leur négligence de la prière et de la méditation.

Ils se contentent de savoir ces choses sans les mettre en pratique. Ils parlent de la grâce de Dieu mais ils ne la recherchent pas. Ils connaissent Jésus-Christ, mais ils ne cultivent pas une étroite communion avec lui. Ils ne sont pas suffisamment chrétiens dans leur vie privée. Ils ne recherchent pas Christ dans leur chambre de prière. "

" La source de la vie ne se trouve pas en nous-mêmes. Elle est en Dieu, et en proportion de notre négligence à nous ressourcer à cette source, par la prière, la lecture et la méditation, nous deviendrons secs et stériles ; tout comme un pré dans un terrain sablonneux et exposé au sol languirait et s'étiolerait par manque d'eau. "

A lire également :

Biographie de Félix Neff - Par Paul Ranc.

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